à Marseille, les restaurateurs aux prises avec la loi littoral demandent une clarification
Bénéfique pour les uns, casse-tête quotidien pour les autres. La loi littoral, votée en 1986, a eu le mérite de stopper la bétonisation galopante des côtes. Toute construction est désormais interd...Bénéfique pour les uns, casse-tête quotidien pour les autres. La loi littoral, votée en 1986, a eu le mérite de stopper la bétonisation galopante des côtes. Toute construction est désormais interdite sur une bande de 100 m de large le long du littoral. Problème, quid des constructions existantes ? Plusieurs habitations et établissements se sont ainsi retrouvés, totalement ou en partie, sur le domaine public maritime. Pour éviter les démolitions en chaîne, un système d'autorisation d'occupation temporaire (AOT) a été mis en place, délivrée au cas par cas par la préfecture maritime.
Pas soumis au même régime
Mais plutôt souples au départ, les autorités auraient durci le ton, de l'avis des professionnels du bord de mer marseillais. « J'ai acheté l'hôtel il y a quatorze ans. Au départ, on a eu une AOT sur quatre ans, puis sur trois. Depuis quatre ans, les AOT sont renouvelées chaque année, raconte Christophe Lasserre, patron du Richelieu, dont la terrasse empiète de 63 m² sur le domaine public. Concrètement, on ne peut faire aucun projet à plus d'une saison. C'est une aberration économique : pas d'investissements possibles, pas de création d'emploi envisageable. C'est négatif, y compris pour la ville. »
Complication supplémentaire, tous les exploitants ne sont pas soumis aux mêmes régimes, y compris à quelques mètres de distance. « Sur une dizaine de restaurateurs pour la plage, certains ont une AOT, d'autres une AOT plus large, leur permettant en plus de mettre des tables sur le sable, d'autres rien du tout, assure Richard Milili, gérant du Petit Mousse, à la Pointe-Rouge. La loi, d'accord, mais la même pour tous. Pourquoi à la Ciotat, les plagistes ont le droit de mettre des matelas ? Pourquoi à Saint-Tropez, les plages sont privées ? »
« Dans les autres communes, l'Etat a délégué le bord de mer au maire, explique Alain Gianella, propriétaire de l'Abrî Cotîé et secrétaire général de la fédération de l'industrie hôtelière. La mairie donne aux exploitants de plage des concessions pouvant aller jusqu'à douze ans… » Selon lui, presque toutes les communes du littoral méditerranéen seraient dans cette configuration, comme tout récemment la Ciotat et Cassis. « Le gros défaut de l'Etat, c'est de ne pas être sur place. Or, chaque territoire a ses spécificités. Prendre en main les plages nous permettra une meilleure gestion, du fait de la proximité », confirme Jean-Jacques Roux, directeur général des services de la ville de Cassis.
A Marseille, on se dit intéressés par la formule. « Plusieurs autorités sont compétentes sur un même espace : l'Etat, la ville, la communauté urbaine… il faut simplifier », concède Martine Vassal, adjointe à l'espace public. Mais pas question de récupérer le bébé sans un nettoyage préalable. « Nous ne serions pas contre, mais qu'on nous rende des côtes gérables, poursuit-elle. Pendant des années, des aménagements plus ou moins légaux ont été faits. Il faut d'abord que l'Etat remette de l'ordre. On est prêt à discuter. » « Depuis dix ans, on fait des réunions en préfecture et on n'a pas avancé d'un centimètre, relève Alain Gianella, un peu désabusé. Du jour au lendemain, on peut nous demander de partir. Nous avons acheté nos affaires en règle, on paye le foncier : On n'est quand même pas des squatteurs ! »