CULTUREMarseille : Tragédie grecque au Théâtre de la comédie

Marseille : Tragédie grecque au Théâtre de la comédie

CULTUREJean-Pascal Mouthier a renové pendant 12 ans le Théâtre de la comédie avant d'être menacé d'expulsion par le propriétaire : l'archevêché de Marseille...
Mickael Penverne

Mickael Penverne

Ce n’est peut-être pas le plus beau théâtre de Marseille mais c’est sans doute le plus personnel. Le Théâtre de la comédie, construit en 1925 dans le 5e arrondissement, a rouvert ses portes en 2013 grâce à un seul homme : Jean-Pascal Mouthier.

Comédien et metteur en scène, cet homme affable et énergique réalise son « rêve d’enfant » en 1999 quand il loue le bâtiment en ruines à son propriétaire, l’archevêché de Marseille. En échange d’une exonération de loyer pendant 12 ans, il s’engage à rénover complètement le théâtre.

Les travaux d'Hercule

À l’époque, il ne restait plus qu'une prise électrique en état de marche, le toit avait quasiment disparu et surtout, 1,2 tonne d’amiante était présente dans les faux plafonds. « J'ai entièrement dépiauté ça tout seul, se souvient Jean-Pascal Mouthier. Un copain m'avait prêté une nacelle pour pouvoir travailler en hauteur. Mais il ne pouvait me la donner que les week-ends. Je travaillais donc du vendredi soir au dimanche soir, quasiment non-stop, en dormant 20 minutes toutes les 2 heures ».

Après ces travaux herculéens, il ouvre enfin le théâtre en mai 2013. C’est là que les ennuis commencent. Sans subvention, ni trésorerie, il accumule les loyers impayés. Il doit, au total, 48 000 € à l’archevêché qui l’assigne en justice. « J’ai travaillé pendant 12 ans, je n’ai pas gagné un centime et on veut m’expulser ?, s’indigne Jean-Pascal Mouthier. Je suis en défaut, c’est vrai, mais je vais tenir mes engagements. Il me faut juste un peu de temps ».

Pas d'opération immobilière

Du temps, il en a eu, estime l’archevêché. « Il a eu 15 ans pour ouvrir son théâtre, soupire Alain de Bovis, économe du diocèse. On ne peut pas nous reprocher de ne pas lui avoir donné sa chance. M. Mouthier est peut-être un bon acteur et un bon metteur en scène, mais en tant que gestionnaire, il a encore des choses à apprendre ».

La seule solution, explique-t-il, serait qu'une collectivité locale (mairie, conseil général, communauté urbaine...) prenne en charge le théâtre. « Et qu'elle le loue ensuite à la compagnie de M. Mouthier ». Et Alain de Bovis le jure : le diocèse n'a pas l'intention de mener une opération immobilière à la place du théâtre. « J'entends ici ou là des rumeurs. Elles sont fausses. Notre intention n'est pas de transformer le théâtre ».

« Ce n'est pas une fabrique de panisses »

« Ils sont vraiment gonflés, réagit Gilles Ascaride. Au départ, ils avaient une ruine, un gars a passé 12 ans de sa vie à la rénover pour essayer d'en faire un théâtre, et maintenant, ils veulent qu'il s'en aille. C'est un comportement d'usurier ». L'écrivain a lancé un comité de soutien à Jean-Pascal Mouthier qui a déjà recueilli près de 20 000 signatures sur Internet. Parmi elles : Jérôme Deschamps, Robert Guédiguian, Philippe Caubère, Dominique Buzet...

« Un théâtre, ce n'est pas une fabrique de panisses, s'énerve Gilles Ascaride. Pour le faire marcher, pour fidéliser le public, il faut du temps (...). Ces gens n'ont aucun sens de la réalité ». L’affaire sera examinée par le tribunal de grande instance de Marseille le 28 novembre.