Marseille / Thierry Colombié: «La fusion des trois BAC ne changera rien»
INTERVIEW•Docteur en sciences économiques, il revient sur les derniers événements concernant les soupçons de corruption au sein de la BAC Nord de la cité phocéenne...Propos recueillis par Amandine Rancoule
Avant la venue, ce vendredi, du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, à Marseille, le docteur en sciences économiques (EHESS), Thierry Colombié, revient sur les derniers événements, des règlements de compte à l'affaire de la brigade anti criminalité (BAC) du secteur Nord.
La fusion des trois BAC est-t-elle le remède à tous les maux?
Il existe une tradition de la corruption à Marseille et ailleurs. D'habitude, le racket est organisé par des malfaiteurs du grand banditisme. Là, les policiers concernés ont franchi la ligne jaune. Je ne crois pas que fusionner les trois services change les choses. Chez certains groupes de policiers il existe une tradition du « border line », du « ne pas travailler dans les règles de l'art ».
Comment est-ce arrivé ?
Certains le justifient par le manque de moyens : « on n'a pas les produits pour dealer les infos ». La drogue sert de troc avec les informateurs. Les policiers font avec ce qu'ils trouvent dans les perquisitions. Ces caisses noires des services ne sont pas nouvelles. Quand on y verra un peu plus clair, on pourrait s'apercevoir que cette affaire dépasse aussi Marseille. On pourrait, par exemple, découvrir des liens avec celle de Lyon.
L'actualité se concentre, pour l'heure, sur Marseille…
Alors que la corruption n'est pas nouvelle. Ce qui est nouveau c'est le secret qui a permis de démanteler le réseau. Avant, il y avait toujours des fuites. Là, une police fait bien son travail. En plus, 2013 justifie cette action à l'automne 2012. En 2013, Marseille sera une vitrine dans le monde. Si le ménage est fait maintenant, ce n'est pas un hasard. Si on ne veut pas présenter la ville comme le Chicago de l'Europe, il faut la nettoyer et donc pointer avant les dysfonctionnements. Il y a des problèmes de corruption dans la police ? On dissout la BAC, on révoque des agents. Il y a des règlements de compte ? On fait un comité interministériel. Depuis, il n'y a plus de règlements de compte. On a placé dans les quartiers nord des juges de paix : des élus ou des gens du milieu. L'agenda est particulier et n'est pas dû au hasard.