Migrants: Apprendre le français, «la clé pour s’intégrer»
INTEGRATION•«20 Minutes» a assisté à Lyon à un cours dans un centre de formation linguistique, suivi par une quinzaine de migrants...Caroline Girardon
Kathuna, stylo à la main, fixe le tableau, prenant quelques notes au passage. La leçon du jour s’articule autour des droits, des devoirs et des interdictions en . Comme acheter un ticket de transports lorsque l’on prend le métro ou ne pas fumer dans les lieux publics.
Cette Géorgienne de 45 ans suit depuis un mois les cours à. Avant, elle ne parlait pas un mot de français comme ses autres « camarades de classe » même si elle réside à Lyon depuis quatre ans.
« Ma fille, qui est désormais au lycée, maîtrise très bien la langue. Elle me demandait toujours de parler français à la maison mais je ne savais pas », explique cette ancienne médecin urgentiste, qui a quitté son pays natal la peur au ventre après l’assassinat de son époux.
Autour de la table, les parcours de vie sont différents. Si William, Libanais, a épousé une Française après avoir vécu et travaillé deux ans dans un hôtel de luxe à Dubaï, Amer et sa femme Rana, syriens, ont fui il y a un an et le régime de . Ils habitaient à Alep.
Senay, 23 ans, est le benjamin du groupe. Le jeune homme, qui rêvait du pays des droits de l’homme, est parti de il y a deux ans. Il a marché jusqu’à l’Ethiopie, le Soudan et la Lybie. De là, il a pris un bateau pour gagner l’Italie. « C’était difficile. On était 400 réfugiés sur la même embarcation ».
Au péril de sa vie, le garçon a erré clandestinement de pays en pays pendant deux ans, poussé par une soif de liberté. « Chez moi, il n’y a pas de démocratie. On ne peut pas dire ce que l’on pense. Ici, on parle d’égalité et de fraternité », explique-t-il.
Senay est arrivé à Lyon il y a quelques mois. Seul. Et un peu perdu. « Mes parents sont restés en Erythrée ». « La plupart sont déracinés et à la recherche de repères et de liens. Ils vivent comme un isolement de ne pas parler français. Ils savent que c’est la clé pour s’intégrer », explique Tijana Campos, formatrice.
« Comme si j’avais les oreilles bouchées »
« Quand je suis arrivée, je voyais mais je n’entendais pas, comme si j’avais les oreilles bouchées. Maintenant, elles s’ouvrent, sourit Pam, thaïlandaise. Maintenant on a interdit l’anglais à la maison ». « Je peux désormais aller consulter l’ophtalmo, prendre rendez-vous par téléphone ou aller chercher mon fils à l’école toute seule », confie sa voisine, heureuse des progrès réalisés en quelques semaines.
Le centre dispense une formation de 200 heures, « une première étape », selon Tadic Gordana, la directrice adjointe. « Elle doit leur permettre d’atteindre le niveau réglementaire requis pour un renouvellement de titre de séjour, à savoir les bases de la maîtrise de la langue française. C’est une première phase d’acquisition de l’autonomie ». Une étape essentielle pour signer un .
Apprendre le « Vivre en France »
« Une partie de l’enseignement est axée sur la vie pratique au quotidien comme les démarches à effectuer pour un logement. L’autre est consacrée au vivre en France », complète Tijana Campos. On leur rappelle par exemple, que l’intégration passe des « règles » obligatoires : savoir se déplacer et communiquer, avoir un logement, connaître les lois du pays, connaître également ses droits et scolariser ses enfants entre autres.
« Deux mois de formation ne sont évidemment pas suffisants pour savoir parler correctement français. On dirige ensuite les stagiaires vers d’autres dispositifs. C’est juste un début ». Kathuna, elle, a déjà prévu de demander une formation pour devenir infirmière.