Le Gévaudan, territoire qui correspond à l’actuelle Lozère, est un pays d’élevage et les bergers, pour la plupart jeunes, ont l’habitude de faire face aux loups venant attaquer leurs troupeaux. Mais la bête qui sévit à partir du mois de juin 1764 s’avère bien particulière, puisque au lieu de chasser les cheptels, elle s’en prend aux humains. La première victime recensée s’appelle Jeanne Boulet, tout juste âgée de 14 ans.

Les attaques se multiplient rapidement, et les paysans de la région montent alors des chasses pour débusquer cette bête, forcément diabolique et démoniaque. Il s’agit certainement d’un loup ou d’un chien de grande taille, mais dans ce siècle profondément religieux, cette bête ne peut être que l’œuvre du Malin. Un capitaine de dragons présent dans la région prend la tête des opérations ; si la bête présumée coupable reçoit deux balles au cours d’une chasse, les attaques mortelles se poursuivent.

Une affaire d’État

L’affaire s’ébruite très tôt. Les journaux, vendus en porte-à-porte par des colporteurs, y voient un sujet vendeur, et ne cessent dès lors d’évoquer les nouveaux drames, les récits de survivants et les nouvelles tentatives vaines de traquer la bête. La Gazette de France s’en fait évidemment l’écho, et l’affaire remonte jusqu’au gouvernement du roi Louis XV. L’un de ses conseillers fait envoyer un chasseur de loups normand, un certain Denneval, mais face à son manque d’efficacité et aux moqueries venant de l’étranger, il est remplacé six mois plus tard.

Le roi charge alors François Antoine, son propre porte-arquebuse, de tuer la bête. Il y va de son honneur et de celui du pays. En septembre 1765, alors que la bête attaque Antoine, l’un de ses hommes l’abat enfin. C’était un loup de 130 livres. Autopsié et empaillé, le trophée est exposé à Versailles. Mais si l’affaire est close pour le roi, les attaques se poursuivent dans le Gévaudan, et il faut attendre juin 1767, quand un paysan dénommé Jean Chastel tue un autre gros loup avec des balles bénites, pour que la bête ne fasse plus parler d’elle.

Et si…

La légende de la bête du Gévaudan n’a pas arrêté de s’écrire il y a 250 ans, puisque la littérature, le théâtre puis le cinéma se sont emparés de ce fait divers plus grand que nature, chaque auteur apportant son hypothèse personnelle à cette affaire empreinte de mystère. Pour certains, il s’agit d’un hybride entre un chien et un loup, pour d’autres d’un grand fauve, voire d’une hyène ou d’un glouton. Mais les principales spéculations, celles qui reçoivent le plus de succès, font état d’une intervention humaine : les massacres du Gévaudan ne peuvent être l’œuvre que d’un déséquilibré, loup-garou malgré lui ou tueur en série au sang-froid, ce qui pourrait expliquer pourquoi certaines victimes ont subi une décapitation, une torture bien étrangère au loup…

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