Violences conjugales: Les hébergements spécifiques manquent, selon les associations
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Un an après la loi sur les violences faites aux femmes, qui prévoit de protéger en urgence les victimes de violences conjugales, les logements spécifiques manquent pour les accueillir, selon les associations, inquiètes des effets de la crise de l'hébergement d'urgence. L'annonce en mai d'une réduction des moyens alloués au secteur de l'hébergement en 2011 a donné le ton: son budget va baisser de 3,3%, à 1,204 milliard d'euros, selon le secrétariat d'Etat au Logement.
Conséquence immédiate, le seul centre d'accueil pour femmes du Samusocial à Paris a fermé ses portes fin juin, et de fait, les associations vont «de nouveau se retrouver dans une situation inextricable», estime Paroles de femmes. «La baisse des subventions générales sur les centres d'hébergement et le 115 en particulier (lié aux associations ponctuellement par des protocoles d'accord, ndlr) font qu'évidemment des femmes se retrouvent sans rien», résume la présidente de Paroles de femmes, Olivia Cattan.
663.000 femmes victimes de violences physiques ou sexuelleschez elles en 2 ans
En deux ans, 663.000 femmes ont été victimes de violences physiques ou sexuelles au sein du foyer, selon une étude de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales publiée mi-juillet. Ces femmes et leurs enfants sont en danger et doivent bénéficier très rapidement d'un logement sécurisé et adapté, de courte, moyenne ou longue durée, insistent les associations.
Le réseau Solidarité femmes compte en Ile-de-France 97 places d'urgence spécifiques et 476 places d'hébergement d'insertion (à long terme), selon Mme Brié. Mais les disparités sont grandes en termes de capacité d'accueil selon les départements.
«Ce sont vraiment des situations très spécifiques et on ne peut pas considérer ces femmes comme des sans domicile fixe ou des femmes qui ont besoin d'une mise à l'abri», explique Françoise Brié, vice-présidente de la Fédération nationale Solidarité Femmes. Selon elle, le malaise de l'hébergement d'urgence a «bouleversé le système qui était en place».
«Les femmes victimes de violences ont besoin d'être mises en sécurité, dans l'urgence, et d'être accompagnées de façon très spécifique, pour aborder les questions juridiques, souvent longues et complexes, la question des enfants, et pour analyser la dangerosité de la situation».
«Une urgence plus plus plus»
La loi du 9 juillet 2010 a notamment créé l'ordonnance de protection qui permet aux victimes de violences d'être soustraites en urgence à leur conjoint et d'évincer ce dernier du domicile -- mais certaines femmes préfèrent tout de même fuir le logement conjugal. Le caractère «d'urgence plus plus plus» de l'ordonnance de protection n'est cependant pas intégré par tous les acteurs impliqués, notamment les services sociaux, déplore Sabine Salmon, présidente de Femmes solidaires.
«Il faut créer un réseau pour la mise en place de cette ordonnance avec les différents acteurs» - police, juge aux affaires familiales, avocats ou associations qui accompagnent les femmes-, dit-elle, regrettant le manque de moyens humains et financiers pour bien appliquer la loi. La loi prévoit également des conventions entre Etat et bailleurs en vue de réserver des logements sur tout le territoire pour les personnes bénéficiant d’une ordonnance de protection. Mais le décret d'application tarde à venir.
Le plan interministériel 2011-2013 de lutte contre la violence faite aux femmes évoque aussi la création dans chaque département d'un accueil de jour spécialisé, censé permettre aux femmes de préparer éventuellement un déménagement ou une réinsertion professionnelle. Mais avec seulement 40.000 euros par département, les associations craignent que la promesse reste lettre morte.