Ecotaxe: ultimatum des «Bonnets rouges» au gouvernement
•Les "Bonnets rouges", fer de lance du mouvement anti-écotaxe, ...© 2013 AFP
Les «Bonnets rouges», fer de lance du mouvement anti-écotaxe, ont lancé mardi un ultimatum au gouvernement, tandis que la majorité veut désormais renégocier le contrat signé du temps de l'ancien gouvernement Fillon avec Ecomouv', objet d'une vive polémique dans la classe politique.
Le mouvement des «Bonnets rouges», à l'origine de la manifestation de samedi dernier à Quimper, a menacé mardi soir de préparer «de nouvelles actions» si l'écotaxe n'était pas «officiellement supprimée» en Bretagne avant mercredi midi, à l'issue d'une réunion à Rennes.
Illustration de la fronde contre cette taxe suspendue la semaine dernière, onze bornes et quatre portiques de collecte de l'écotaxe ont été détruits sur l'ensemble du territoire depuis le début de la contestation, selon le ministère des Transports.
Les portiques sabotés l'ont tous été en Bretagne, berceau de la fronde anti-écotaxe. Le ministère n'a pas précisé où les bornes avaient été détruites, hormis pour deux d'entre elles, dans les Landes et dans le Nord. 163 portiques prévus étaient déployés sur les 173 prévus, selon le ministère, qui n'a pas précisé combien des 200 bornes prévues avaient été installées.
Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a estimé mardi qu'il fallait «revoir toute la logique du contrat» avec Ecomouv', via une «négociation très serrée» avec la société qui «ne s'est pas acquittée de ses responsabilités».
«Nous serions fondés à la mettre en cause compte tenu de la non exécution d'un certain nombre d'obligations», a-t-il affirmé sur BFMTV. Interrogée par l'AFP, Ecomouv' n'a pas souhaité réagir.
Pour autant, cette taxe doit «être mise en place», a estimé son collègue aux Transports Frédéric Cuvillier, qui s'est gardé d'avancer une date.
L'Etat est lié par un partenariat public-privé (PPP) signé en 2011 par l'ancien gouvernement Fillon, qu'il ne peut abandonner sous peine de devoir verser un milliard d'euros à Ecomouv', chargée de collecter la taxe.
Selon ce contrat, Ecomouv', contrôlée par le groupe italien Autostrade en association avec Thales, la SNCF, SFR et Steria, doit toucher 250 millions d'euros par an, soit environ 20% des recettes attendues de l'écotaxe. Un montant supérieur à certains contrats similaires dans plusieurs pays voisins.
Commission d'enquête parlementaire
Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'Etat et élue bretonne, a regretté «la part trop belle» revenant à Ecomouv', tout en appelant à lever les «a priori». Au ministère des Transports, où l'on dénonçait lundi un profit «énorme» de la part d'Ecomouv', on reconnaît toutefois désormais que le coût de la collecte n'est «pas si élevé, car il y a un investissement important nécessaire pour l'infrastructure» (portiques et bornes) et que la société «n'est pas du tout intéressée en fonction du niveau de la taxe».
Pour autant, les sénateurs socialistes vont demander la création d'une commission d'enquête parlementaire sur Ecomouv', a annoncé leur chef de file, François Rebsamen. Le patron des députés PS, Bruno Le Roux, a rappelé de son côté qu'une enquête préliminaire ouverte au parquet de Nanterre visait toujours la société.
«Il y a aujourd'hui nécessité à aller plus loin dans l'enquête. (...) Il semblerait qu'il y ait eu un certain nombre de liens entre la société qui a conseillé, qui a préparé le marché, celle qui l'a obtenu, des appels d'offres sur lesquels les uns se sont mis en avant, ensuite se sont retirés», a-t-il estimé sur Europe 1.
En 2011, la justice administrative avait dans un premier temps invalidé le choix d'Ecomouv', car le cabinet suisse Rapp Trans AG, qui conseillait le gouvernement Fillon sur le dossier de l'écotaxe, travaillait également avec Autostrade. Une décision ensuite été cassée par le Conseil d'Etat.
Le ministre italien des Transports Maurizio Lupi a apporté son grain de sel en se disant «étonné» des propos de M. Moscovici et en prenant la défense d'Autostrade.
A l'approche des municipales, l'écotaxe fait aussi figure de patate chaude à droite, sur fond de rivalités au sein de l'UMP. Au lendemain des critiques de Xavier Bertrand et Rachida Dati, le président du parti Jean-François Copé l'a à son tour torpillée. «Ce qui est surtout critiquable, c'est le montage. De tels coûts de gestion sont aberrants», a déclaré le président de l'UMP sur I>Télé, tout se disant «solidaire» de l'ancien gouvernement.
Ancienne ministre de l'Ecologie du gouvernement Fillon, et candidate UMP à la mairie de Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet a maintenu que le contrat avec Ecomouv' avait été passé «dans les règles», et défendu le principe de principe de l'écotaxe, qu'elle estime «juste».
L'ancien ministre des Transports Thierry Mariani s'est quant à lui offusqué des déchirements au sein de son camp. «Depuis 48 heures, c'est le festival des faux culs et le bal des lâches», a-t-il lancé sur Twitter.
La dirigeante du FN Marine Le Pen avait quant à elle renvoyé lundi l'ancien et l'actuel gouvernement dos-à-dos, dénonçant dans l'écotaxe un «symbole de l'+UMPS+».