ANIMAUXDéminage: Des abeilles butineuses de TNT en renfort dans les Balkans

Déminage: Des abeilles butineuses de TNT en renfort dans les Balkans

ANIMAUXAvec les inondations en cours, des glissements de terrain risquent de mettre à jour des mines datant de la guerre de Croatie. Et si les abeilles-démineuses entraient en action ?…
Fabrice Pouliquen

F.P. avec AFP

En matière d’odorat, les abeilles font aussi bien que les chiens renifleurs. A l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) d’Avignon (Vaucluse), le biologiste Yves Le Conte a même entrepris de les dresser à repérer les mines. Ce qui pourrait servir en ce moment dans les Balkans où les inondations menacent de faire réapparaître les quelque 90.000 mines ensevelies il y a vingt ans pendant la guerre en ex-Yougoslavie.

«Déclencher un réflexe de type pavlovien chez l’abeille»

«On savait déjà les abeilles sensibles à certaines odeurs, celles du géranium ou du néroli par exemple. Le défi, c’est de leur apprendre à repérer le TNT», explique Yves Le Conte. C’est un chercheur croate du département d’agriculture de l’Université de Zagreb qui l’a contacté il y a quatre ans. Nikola Kesic était préoccupé par le nombre de mines anti-char et anti-personnel toujours emprisonnées dans les sols de son pays et de la région.

«Il s’agissait de déclencher un réflexe de type pavlovien chez l’abeille», reprend le biologiste, qui se rend alors à Zagreb. L’expérience consiste à dissimuler du TNT sous du sable recouvert de sirop bien sucré pour appâter les butineuses. Et ça marche! Très vite même: il dispose dix boîtes dans la nature, cinq boîtes-témoins avec du TNT et cinq sans TNT. Les abeilles ne s’y trompent pas: elles foncent sur l’explosif. Mais Apis, l’abeille butineuse, ne se laisse pas leurrer longtemps et quand elle comprend qu’il n’y a plus de sucre, elle se désintéresse rapidement de l’affaire. Ce qui contraint les chercheurs à la «rééduquer» au sucre régulièrement, environ toutes les demi-heures.

Une méthode très simple et très rapide

Nikola Kesic poursuit aujourd’hui l’expérience et reprendra ses travaux en plein champ à partir du 15 juin jusqu’en juillet, «avec une colonie entière de quelque 30.000 abeilles, grâce à des financements européens», indique-t-il. Selon ses observations, le succès est encore plus évident avec un explosif comme le DNT (dinitrotoluène) qu’avec le TNT. Lors de tests au printemps 2012 dont il a publié les résultats dans une revue allemande, Kesic a noté que 40 abeilles se sont posées en moyenne sur les cibles au DNT et trois sur le témoin. Alors que pour le TNT, à peine plus de la moitié des abeilles avaient préféré l’explosif au témoin.

«Nous espérons maintenant convaincre les spécialistes du déminage avec des résultats», reprend Nikola Kesic qui convient qu’ils se montrent encore sceptiques. Pourtant, la méthode est «très simple et très rapide», affirme-t-il.