«Beyond»: Un thriller fantastique et interactif avec Ellen Page et Willem Dafoe

«Beyond»: Un thriller fantastique et interactif avec Ellen Page et Willem Dafoe

JEU VIDEO – Avec «Beyond: Two Souls», David Cage et son studio français Quantic Dream empruntent aux techniques du cinéma hollywoodien…
Joel Metreau

Joel Metreau

C’est le jeu que les «gamers» vont détester puisqu’il ne fait pas appel à leur habileté. C’est le film que les cinéphiles snoberont puisqu’il nécessite l’intercession d’une manette ou d’un écran tactile. «Beyond » (Sur PlayStation 3, environ 60 euros), qui sort ce 9 octobre, est d’abord un thriller fantastique qui met en scène une femme pendant quinze ans de sa vie. C’est la vie tragique de Jodie Holmes, accompagnée dès son plus jeune âge par une entité invisible, protectrice et possessive.

«Des limites qu’on essaie de rendre invisibles»

Pour dérouler le fil de cette histoire: une narration interactive et non linéaire, avec 23 fins envisageables. Le Français David Cage, 44 ans, directeur du jeu et du studio Quantic Dream, évoque «une expérience à la frontière du cinéma et du jeu vidéo», qu’il a déjà explorée pour «Heavy Rain» (3,2 millions d’exemplaires vendus). Pour «Beyond», il a livré un script de 2.000 pages, pas une histoire, mais «un espace narratif où va se promener le joueur, un espace avec des limites qu’on essaie de rendre invisibles», explique-t-il. «Beyond m’a été inspiré par la perte de quelqu’un qui m’a été proche. Quand j’ai eu la vision de son cercueil descendre dans la tombe…», confie-t-il.



«L’empathie et la tristesse»

«Souvent le jeu vidéo est centré sur des émotions comme l’adrénaline, le stress et la peur, explique David Cage. Ce qui m’intéresse, c’est l’empathie et la tristesse. Ce qu’on peut trouver dans d’autres formes d’art, rarement dans le jeu vidéo.» Beyond s’avère ainsi plus proche de l’adaptation en jeu vidéo de «Walking Dead» par Telltale Games, où le cœur du jeu était fondé sur des dilemmes intenses. «Dans le jeu vidéo, l’expérience est souvent mécanique, répétitive et violente. Ce qui nous intéresse, ce sont les choix qu’on peut faire dans une vie.»

Pour susciter l’émotion, «Beyond» a recours à la «performance capture» afin de saisir au plus près le jeu des comédiens. Et pas n’importe lesquels. Si 160 acteurs ont participé au tournage sur plus d’un an, les deux têtes d’affiche sont Ellen Page (Juno, Inception, Xmen 3…) et Willem Dafoe. Pour la bande originale, un compositeur stakhanoviste venu aussi d’Hollywood, c’est Hans Zimmer (Gladiator, The Dark Knight…) Le tournage, qui a duré plus d’un an, s’est déroulé dans le studio parisien de Quantic Dream.

Un défi pour les acteurs

Les acteurs ont dû interpréter leur rôle sur un plateau vide, sans décors ni costumes. «C’est un travail atypique pour l’acteur et le réalisateur, qui ressemble à celui qu’on aurait sur une scène de théâtre, raconte le directeur de «Beyond». Et comme, on passe très vite d’une scène à l’autre: action, romance, Ellen Page finissait la journée émotionnellement en vrac.» Autre défi pour les acteurs, «Beyond» étant non linéaire, ils doivent jouer toutes les variations de la scène que choisira le joueur. «C’est un exercice d’acteur intense. Il doit être capable d’interpréter une chose et son contraire en peu de temps», ajoute David Cage.



Sans game over, ni manette

Enfin, soucieux d’ouvrir son titre aux réfractaires de la manette, «Beyond» peut être parcouru sans ce «bout de plastique compliqué». Le studio a développé une application gratuite pour smartphone et tablette, qui permet de diriger l’héroïne ou son entité, avec un écran tactile. Pas de game over non plus dans «Beyond». «Pour éviter les impasses, on crée de nouvelles branches scénaristiques. Dans un jeu narratif, le game over n’a aucun sens, assène David cage. C’est un aveu d’impuissance, c’est l’échec du scénariste…»

90 pastilles sur le visage et 65 caméras

C’est une technique utilisée par des films, en partie (Avatar de James Cameron) ou intégralement (Les aventures de Tintin de Spielberg). Elle consiste à scanner le corps et les visages des acteurs. Pour «Beyond», 90 pastilles sont été collées sur une combinaison, autant sur le visage. Quelque 65 caméras captent en 3 dimensions et avec une précision inférieure au millimètre les pastilles brillantes. Du coup, on obtient un personnage qui ressemble à l’acteur original et qui va pouvoir être intégré dans de multiples décors virtuels.