Gâchis d'argent public: la Cour des comptes publie son rapport annuel
Dérapage du déficit, lutte contre le dopage, principe pollueur-payeur: comme chaque année, la Cour des comptes signale dysfonctionnements et gâchis d'argent public dans son rapport public annuel publié mercredi.© 2015 AFP
Dérapage du déficit, lutte contre le dopage, principe pollueur-payeur: comme chaque année, la Cour des comptes signale dysfonctionnements et gâchis d'argent public dans son rapport public annuel publié mercredi.
Ce rapport de 1.500 pages qui comporte 30 entrées commence par une longue analyse de la situation des finances publiques françaises, que la Cour juge «fragile» pour les années qui viennent.
Elle estime ainsi que la baisse du déficit public (Etat, collectivités territoriales, protection sociale), de 4,4% du Produit intérieur brut, en 2014, à 4,1%, en 2015, est «un objectif dont la réalisation est incertaine», évoquant tant des prévisions de recettes trop ambitieuses que des économies de dépenses insuffisamment détaillées.
Au premier rang de ses préoccupations, la très faible inflation qui a dominé 2014 et risque selon elle de se poursuivre en 2015.
«Les pouvoirs publics doivent se pencher sans tarder sur les enjeux que soulève la période actuelle de très faible inflation», a déclaré le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, devant la presse mercredi. Selon lui, «elle remet en cause les perspectives d'équilibre des finances publiques et le cadre budgétaire triennal» sur lesquels reposent le budget de l'Etat et les prévisions de dépenses de l'assurance-maladie.
Alors que le gouvernement assume désormais le ralentissement du rythme de réduction du déficit public, M. Migaud l'a enjoint à «s'engager résolument en faveur du redressement des comptes publics, pour une action publique plus exigeante, plus rigoureuse, plus efficace et plus efficiente».
Mercredi à l'issue du conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a assuré qu'«il n'y a rien à changer sur les objectifs qui ont été fixés» en matière de déficit public.
- «Du point de vue des citoyens» -
Dans son rapport, la Cour appelle à maîtriser encore davantage la dépense publique, sans augmenter les prélèvements obligatoires. Pour M. Migaud, subsiste trop souvent un «décalage entre les engagements pris, les objectifs affichés, les moyens qui leur sont consacrés et les résultats obtenus».
Comme pour éclairer ce propos, le premier président a annoncé que la Caisse des Dépôts allait être traduite devant une instance disciplinaire pour une «dérive choquante» dans les rémunérations de certains cadres et dirigeants.
La Cour des comptes critique également vertement les agences de l'eau qui collectent 2 milliards d'euros de redevance par an et orchestrent selon elle le principe pollueur-payeur depuis la loi sur l'eau de 2006. La part dans la redevance des agriculteurs et industriels est trop faible, l'attribution des aides «insuffisamment transparente» et les règles «inégalement respectées», estime-t-elle, reprochant également des opérations de communication ou d'évènements «dispendieux».
Elle se montre également très sévère à l'égard de l'agence française de lutte contre le dopage, accusée de ne pas suffisamment sélectionner ses cibles mais aussi de négliger la recherche et de conduire trop inégalement des politiques de prévention.
Le réseau des oeuvres universitaires et scolaires (Crous et Cnous) est prié de mieux contrôler l'assiduité des étudiants boursiers afin d'éviter les fraudes; quant au Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerrannée (Mucem) elle estime qu'elle a souffert d'une gestation «laborieuse», son équilibre économique étant décrit comme «fragile».
- Sous-préfectures -
Sur un terrain plus positif, la Cour défend en revanche le réseau de trains Intercités mais en suggérant que son périmètre et son financement soient redéfinis, sans exclure l'éventuelle suppression des dessertes les plus déficitaires.
Elle se dit satisfaite de la réforme de la carte judiciaire mais insiste à nouveau sur la nécessité de «dessiner une nouvelle carte» des sous-préfectures, en supprimant les moins utiles.
La Cour conseille en outre de sortir de «l'inextricable maquis» des sur-rémunérations des fonctionnaires de l'Etat en poste outremer, qui coûtent plus d'un milliard d'euros par an, recommandant «une réforme d'envergure».
La Cour s'insurge également à nouveau contre les retards pris dans le chantier du campus de Jussieu et son «coût croissant» évalué en 2014 à 2,05 milliards d'euros, soit plus de dix fois ce qui était prévu.
Les aéroports de Dijon et de Dole, distants de moins de cinquante km, agacent également les magistrats qui réclament la fin des subventions et la mise en place d'«un scénario alternatif de desserte aérienne».