Groupe EI: un Français parmi les bourreaux, Paris ouvre une enquête
Un Normand de 22 ans a participé "directement", peut-être avec ...© 2014 AFP
Un Normand de 22 ans a participé «directement», peut-être avec un second Français, à la décapitation d'otages par le groupe État islamique (EI), mettant en lumière l'engagement jihadiste de Français en Syrie où ils représentent l'un des plus gros contingents d'Européens.
La justice française a ouvert lundi une enquête notamment pour «assassinats en bande organisée», a annoncé le procureur de Paris, François Molins, concernant «les agissements de deux Français qui pourraient être impliqués dans les exactions mises en ligne» dimanche.
Dans une «vidéo de propagande», le groupe jihadiste met en scène la mise à mort de 18 prisonniers syriens et de l'otage américain Peter Kassig.
Le premier Français visé est Maxime Hauchard, «né le 17 mars 1992 en Normandie de parents eux-mêmes nés en Normandie», selon le procureur, et identifié parmi les bourreaux.
François Molins a aussi évoqué la présence «possible» sur cette vidéo d'un second Français qui pourrait être, si cela est confirmé par les services spécialisés, «un jeune converti» du même âge, parti rejoindre l'EI en août 2013.
Maxime Hauchard, originaire de l'Eure, est parti en Syrie à cette même date, après deux séjours en Mauritanie fin 2012 début 2013. Il était déjà visé depuis l'été dernier par une enquête préliminaire.
La vidéo de l'EI montre un jihadiste jeune et barbu, ressemblant à ce jeune Français, vêtu d'un treillis camouflage. Il conduit de la main gauche un prisonnier avant de saisir un couteau. On ne le voit pas exécuter cet otage, mais on distingue ensuite la tête de la victime détachée de son corps.
- «Emblématique» -
«Leur faire faire ce genre d'horreur est à la fois un test - vont-ils en être capables ? - et vise à les fidéliser au sein du groupe», a commenté un haut responsable français de la lutte antiterroriste. «Une fois qu'ils sont apparus commettant ce genre d'acte à visage découvert, il n'y a plus de retour en arrière possible.»
Mi-juillet, Maxime Hauchard avait témoigné via Skype sur BFMTV à visage découvert depuis Raqqa, fief de l'EI en Syrie. Il avait raconté s'y être rendu depuis Paris via Istanbul, après avoir acheté un billet «pas cher», sans se «cacher».
Converti à 17 ans à l'islam, il explique s'être radicalisé avec des vidéos sur internet, affirme être parti seul, puis avoir été rapidement pris en charge en Syrie. «L'objectif personnel de chacun ici, c'est le chahid (celui qui tombe en martyr, ndlr). C'est la plus grande récompense», assure-t-il.
Selon Baptiste, un de ses amis au Bosc-Roger-en-Roumois (Eure), «il s'est forgé tout seul une identité» via internet et les réseaux sociaux sur lesquels il était très présent avec le nom de jihadiste qu'il s'attribuait, «Abu Abdallah al Faransi» c'est-à-dire «le Français».
La dérive de Maxime Hauchard est «loin d'être un cas isolé», il est «emblématique d'une certaine problématique», a souligné François Molins, se refusant à préciser si d'autres Français avaient été identifiés comme auteurs d'exactions en Syrie et en Irak.
Les services spécialisés sont convaincus de la participation de Français à des atrocités commises par différents groupes jihadistes. Comme cet homme actuellement détenu, qui en a confessé après son retour en France de Syrie, selon une source proche du dossier.
Plus de 1.100 Français sont impliqués dans les filières jihadistes et 376 d'entre eux sont actuellement présents en Syrie ou en Irak. Au moins 36 Français y ont déjà trouvé la mort.
Loin des caricatures, ces jihadistes ne sont pas des jeunes fragilisés socialement, mais sont au contraire majoritairement issus de classes moyennes, selon une étude du Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI). Et à l'image de Maxime Hauchard, ils sont recrutés à 91% sur internet. Sur cinq jihadistes venus de France pour combattre en Syrie et en Irak, un est un converti, une proportion jugée importante par les spécialistes.