Crise à Sciences Po Aix, menacé d'exclusion du concours d'entrée
•Un vent de crise souffle sur l'Institut d'études politiques ...© 2014 AFP
Un vent de crise souffle sur l'Institut d'études politiques (IEP) d'Aix-en-Provence où l'externalisation de diplômes, par le biais de partenariats controversés avec des écoles privées, provoque l'inquiétude des étudiants et des autres "Sciences Po" de province qui le menacent d'exclusion.
"L’IEP traverse depuis quelques jours une crise", a reconnu la direction dans un communiqué du 10 octobre, faisant référence à une polémique sur le port du voile et à "l’externalisation d’une spécialité de master".
La crise a démarré en juillet avec la démission de quatre enseignants dont deux élus du conseil d'administration de l’institut à propos de la question des diplômes.
Depuis plusieurs années, l'IEP d'Aix a multiplié, moyennant finances, les partenariats avec des écoles et organismes privés en France (Institut de gestion sociale, Centre d'études supérieures industrielles) ou à l'étranger. Ainsi sont nés "Sciences Po Île Maurice" , "Sciences Po Réunion", "Sciences Po Arménie" ou encore un accord avec l’Université professionnelle d’Afrique de Kinshasa (RDCongo) qui délivrent un master équivalent à celui des étudiants ayant suivi, après un concours difficile, le cursus à Aix.
Sciences Po Aix aurait aujourd'hui 200 étudiants dans le cadre de partenariats externalisés pour 280 +internes+, "c'est inacceptable", jugent les représentants des étudiants en dénonçant des "diplômes au rabais" qui dévalorisent selon eux leur propre titre universitaire.
Fin septembre, les responsables des six autres Instituts d'études politiques -Lille, Lyon, Rennes, Strasbourg, Toulouse et Saint-Germain-en Laye- ont sommé le directeur de l'IEP d'Aix, Christian Duval, de s'expliquer sur cette externalisation, menaçant d'exclure Aix du concours commun d'entrée et fixant au 10 novembre la date butoir.
- Fronde -
Au lendemain d'une première manifestation d'étudiants, le 9 octobre, M. Duval a annoncé "l’abandon des masters externalisés" litigieux et proposé d'attendre les résultats d'un audit sur la question. Il a annoncé par ailleurs qu'il engagerait "sa responsabilité" devant le Conseil d'administration de l'IEP présidé par la directrice du FMI, Christine Lagarde.
Mais la fronde s'est poursuivie chez les étudiants : lettre ouverte de leurs représentants et de l'association des doctorants, mise en ligne d'une pétition et nouvelle manifestation, le 28 octobre pour réclamer cette fois la démission de M. Duval.
"J’ai dénoncé tous les partenariats avec les écoles à l’étranger où, depuis 2012, nous organisions en formation continue ou en alternance le master Management de l’information stratégique", a répété M. Duval lors d'un point de presse après la manifestation.
Le directeur chiffre à 80 le nombre de masters délivrés à l’étranger. Les partenariats qui devaient débuter en 2014 ont également été dénoncés. Seule la convention avec l’IGS qui lie les deux écoles jusqu'en 2018 a été maintenue. M. Duval assure avoir le souci de "préserver le concours commun" qui sera présenté le 15 novembre.
En visite à Marseille mardi, la ministre de l'Education nationale Najat Vallaud-Belkacem a temporisé : "C'est un équilibre à trouver, pour ne pas être trop tiré vers la privatisation. Le directeur de Sciences Po Aix en a conscience. Il est en train de travailler sur ce sujet. Je lui laisse le temps d'y travailler, pour rééquilibrer si besoin. Un diagnostic est en train d'être fait", a-t-elle dit.
Mais "il ne faut pas tendre vers une trop grande privatisation des enseignements", a-t-elle ajouté.
Réunis en assemblée générale, lundi, les élèves de l’institut qui déplorent par ailleurs une absence de transparence et demandent un audit 'indépendant", ont appelé à une "journée banalisée" jeudi, les discussions devant remplacer les cours. Au même moment, leur directeur devait s'expliquer devant les six autres responsables d'IEP. M. Duval rencontre jeudi également la directrice générale de l’enseignement supérieur.