« Condamné à tort »

« Condamné à tort »

Patrick Dils a fait quinze ans de prison pour le meurtre de Montigny-lès-Metz, avant d'être acquitté
Francis Heaulme est soupçonné d'être l'auteur des meurtres d'Alexandre Beckrich et de Cyril Beyning, qui étaient âgés de huit ans, pour lesquels Patrick Dils avait été condamné à deux reprises avant d'être acquitté par la cour d'assises du Rhône en avril 2004.
Francis Heaulme est soupçonné d'être l'auteur des meurtres d'Alexandre Beckrich et de Cyril Beyning, qui étaient âgés de huit ans, pour lesquels Patrick Dils avait été condamné à deux reprises avant d'être acquitté par la cour d'assises du Rhône en avril 2004. - Mehdi Fedouach AFP/Archives

Patrick Dils a été condamné le 27 janvier 1989 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de deux garçons de 8 ans à Montigny-lès-Metz (Moselle). Il a finalement été acquitté le 24 avril 2002. Retour sur quinze ans d’erreur judiciaire.


Le 28 septembre 1986, les corps de deux garçons de 8 ans sont retrouvés morts, le crâne fracassés à coups de pierre, à Montigny-lès-Metz en Moselle. Les soupçons se portent assez rapidement sur Patrick Dils, un jeune apprenti cuisinier de 16 ans, qui se trouvait à proximité des lieux le soir du double-meutre – on apprendra plus tard qu’il était en réalité parti chercher des timbres dans une benne –. Il est interpellé le 28 avril 1987 et passe aux aveux deux jours plus tard. Il reconnaît notamment les pierres qui ont servi au meurtre, mais il commet des «erreurs» et des « oublis majeurs », comme le pantalon baissé d’un des enfants, attestant d’un crime « à connotation sexuelle ». Le 30 mai, il se rétracte par lettre au juge d’instruction. Rien n’y fait. Patrick Dils est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité le 27 janvier 1989, malgré sa minorité au moment des faits. Ses avocats font une première demande en révision auprès de la cour de Cassation le 16 juillet 1990. Rejetée. Le 6 mai 1994, la grâce présidentielle est demandée. Rejetée. En 1998, l’affaire prend une nouvelle tournure après qu’un co-détenu du tueur en série Francis Heaulme révèle que ce dernier lui aurait confié être l’auteur des deux meurtres. D’autres témoignages confirment que le tueur en série, déjà condamné plusieurs fois, demeurait à l’époque à proximité des lieux du crime et a été aperçu « le visage en sang ». Le 27 mars, l’avocat de Patrick Dils dépose alors une nouvelle requête en révision. Entendue cette fois-ci. En juin 2000, la Cour de révision ordonne un supplément d’instruction. Entre temps, Francis Heaulme reconnaît avoir été sur place le jour du crime et avoir vu les enfants mais nie être l’auteur des meurtres. Le 3 avril 2001, la Cour de révision finit tout de même par annuler la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité de Patrick Dils mais refuse de le libérer en attendant un nouveau jugement. Un deuxième procès a lieu, mais il aboutit sur une nouvelle condamnation de Patrick Dils à vingt-cinq ans de réclusion, faute d’éléments suffisants pour prouver son innocence. Ce dernier fait appel. En mars 2002, un rapport d’enquête de gendarmerie confirme que le crime de Montigny-lès-Metz porte la « quasi signature criminelle » de Francis Heaulme. Patrick Dils est alors rejugé pour la troisième fois devant la cour d’assises des mineurs du Rhône. Il est acquitté le 24 avril et sort de prison, le soir-même, à 22h10.

Pendant ce temps, il aura passé quinze ans en prison, où il avouera avoir été « frappé, brutalisé, violé ». «Sans haine à l’égard de personne», il souhaite juste que sa vie reprenne « un cours normal».

Le 9 juin 2006, Francis Heaulme, a été mis en examen pour ces meurtres. La reconstitution avait lieu hier.


Catherine Fournier