Ces ex forcés de cohabiter
•Société Avec la crise, de plus en plus de couples diffèrent leur séparationDelphine Bancaud
Dos contre dos. Chaque nuit, Elodie, 27 ans, s'allonge auprès de son ex-conjoint dans un lit qui n'a plus rien de «conjugal». Car, depuis plusieurs mois, le couple s'est disloqué, mais n'a pas les moyens de vivre séparément, par peur de sombrer dans la précarité. «Nous sommes tous les deux fonctionnaires. Mon conjoint touche 1 200 € net, moi 1 400 €. Aujourd'hui, avec 900 € de loyer, 350 € de crèche pour notre fils et une ribambelle de factures à payer, on parvient juste à boucler nos fins du mois. Une séparation nous enfoncerait sous terre, explique Elodie. Nous n'avons pas les moyens de louer deux appartements dans le parc privé, à moins d'échouer dans une cage à poules. Et nous ne sommes pas prioritaires pour demander une HLM. Pas question non plus pour l'un de nous de retourner vivre chez ses parents. Ce serait une régression totale.»
La cohabitation n'a rien d'évident au quotidien. «Quand il n'y a plus d'amour, les défauts de l'autre sont encore plus exaspérants. Il y a des tensions entre nous et beaucoup de cris dans la maison, même si l'on évite de se disputer devant le petit», confie Elodie. Alors, pour que la situation reste vivable, le couple a instauré quelques règles : prévenir de ses allées et venues, participer aux tâches ménagères, s'occuper tour à tour de leur fils. «Le seul avantage de la situation, c'est qu'il a toujours les mêmes repères et qu'il peut grandir auprès de ses deux parents», souligne Elodie.
Quant à l'avenir, la jeune femme a du mal à s'y projeter. «J'ai bien peur que cette situation censée être temporaire ne dure. Il n'y a que deux issues : que l'un de nous rencontre quelqu'un et puisse emménager avec ou que je réussisse un concours, ce qui me permettra d'accéder à un meilleur salaire», conclut Elodie, résignée.