Présidentielle: Pour les macronistes, difficile de militer dans les bastions FN
POLITIQUE•En Moselle-Est, le candidat d’En marche! n’est arrivé qu’en troisième position, loin derrière Marine Le Pen…Coralie Lemke
Pas de start-up, pas d’incubateurs ou de centre de formation des apprentis. Les militants d’En marche ! se sont donné rendez-vous sur le parking d’un magasin de grande distribution, où l’hymne européen tourne en boucle. A Spicheren, à quelques centaines de mètres de la frontière allemande, ils manifestent en faveur du maintien dans l’Union européenne. Une action forte dans cette ancienne région minière.
En marche ! n’est arrivé qu’en troisième position lors du 1er tour de la présidentielle à Forbach, la ville voisine. Avec 29,65 % des voix, le FN est en tête, loin devant la France insoumise (21,69 %) et le parti d’Emmanuel Macron (17,87 %). L’abstention, elle, devance tous les partis. 35,60 % des électeurs ne se sont pas déplacés.
Sous la pluie, Christophe Arend, animateur du comité de Forbach, prend le micro devant environ 80 militants. « Humanistes de tous horizons, n’oublions pas qu’aujourd’hui les gens passent la frontière librement et qu’ensemble nous sommes plus forts », souligne-t-il, abrité sous un préau où sont rangés des caddies. Il s’est engagé en faveur de l’ancien ministre de l’Economie en avril 2016. De quatre personnes, le comité de Forbach compte aujourd’hui 82 membres.
Des échanges parfois tendus
C’est aussi dans cette ville de Moselle-Est que Florian Philippot a mené une liste FN aux élections municipales de mars 2014. Aujourd’hui, certains militants doivent parfois calmer le jeu face aux Frontisteslors de tractages, comme à la braderie de Saint-Avold, à quelques kilomètres de là. « Au début, il arrive que les échanges soient tendus. Mais dès qu’on leur fait comprendre qu’on est ouverts d’esprit, ça va mieux », explique Umit Yildrim, référent En marche ! à Saint-Avold. « Ça me fait mal de voir que le FN a autant d’influence dans la cité où j’ai grandi », confie-t-il.
« Dans la région, les gens se sentent abandonnés. Un jour, une jeune femme m’a dit qu’elle voulait voter FN parce que le banquier lui avait refusé un prêt pour construire une maison. Ça n’est pas rationnel », déplore Guy Cambianica, membre du comité des macronistes de Metz et adjoint au maire, qui se dit politiquement au « centre du centre ». « Malheureusement, le vote frontiste est l’expression d’une frustration. »
« Les gens ne se sentent plus représentés »
Sur la place centrale de Stiring-Wendel, la ville voisine, le cortège croise deux seniors en promenade. « Moi, je suis un pauvre ouvrier et je vote FN. Macron, il ne m’intéresse pas », s’énerve le passant de 68 ans. « Je ne veux pas entendre parler d’eux. Je suis contre les capitalistes », renchérit son acolyte.
« Les gens ne se sentent plus représentés. Mais il faut œuvrer pour le vivre-ensemble. Ici, on sort faire la fête et faire ses courses en Allemagne. Les gens prennent ça pour acquis. Ils ne se rendent pas compte que c’est un avantage qu’ils peuvent perdre si le FN arrive au pouvoir », déplore Christophe Arend.
« Macron, c’est un banquier. » « Macron est à la solde des Rothschild. » Il faut souvent répondre aux mêmes arguments, explique Véronique, 48 ans, membre du collectif de Metz. « On nous dit que le mouvement ne propose rien pour les gens défavorisés, pour les ouvriers. Moi, je travaille dans une médiathèque. Les précaires, je les vois tous les jours. Et je sais leur parler. » Elle s’applique à rappeler les mesures en faveur de l’emploi et insiste sur l’expérience du candidat Macron dans le domaine économique.
« Avant tout, on respecte les opinions de chacun. Je suis très attachée à la bienveillance dont parle Emmanuel Macron. Là où je travaille, par exemple, plusieurs personnes m’ont dit qu’elles allaient voter pour Marine Le Pen », explique Cathy, qui exerce dans le milieu hospitalier. Elle essaye de convaincre ses collègues en douceur. Peu importe que les électeurs choisissent Macron ou l’abstention, « l’essentiel, c’est que Le Pen ne passe pas », souffle un jeune sympathisant.