POLITIQUEEmmanuel Macron face à Marine Le Pen, deux définitions du mot «patriote»

Le mot «patriote» au cœur du débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen

POLITIQUELe candidat d’En marche ! et la candidate FN n’utilisent pas le terme « patriote » dans le même sens…
Les candidats Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
Les candidats Emmanuel Macron et Marine Le Pen. - 20 Minutes/SIPA
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Marine Le Pen et Emmanuel Macron utilisent tous deux le mot « patriote ».
  • Les deux candidats s’en servent pour attaquer leur adversaire.

Un mot, deux définitions. Depuis dimanche, Marine Le Pen et Emmanuel Macron se présentent comme les candidats des « patriotes ». Lundi soir, au JT de France 2, la candidate du Front national en a remis une couche, en appelant au « rassemblement le plus large des patriotes ».

  • « Le patriotisme, c’est de l’amour, un sentiment profond que l’on a ou que l’on n’a pas, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on ne le ressent pas chez Emmanuel Macron, ni à l’égard de la France, ni à l’égard des Français. »

N’en déplaise à Marine Le Pen, le chef de file d’En marche ! s’est lui aussi présenté comme le futur « président des patriotes » dès dimanche soir.

  • « Il n’y a pas plusieurs France, il n’y en a qu’une, la nôtre, la France des patriotes dans une Europe qui protège et que nous aurons à refonder. »

Le patriotisme, de la gauche révolutionnaire à l’extrême droite

Comment expliquer que deux camps si opposés utilisent le même terme ? Voyons ce qu’en dit le dictionnaire : pour le Larousse 2017, le patriote est « une personne qui aime sa patrie, qui s’efforce de la servir ». Bon, et du côté de l’histoire ? « La notion de "patriotes" fait historiquement référence aux partisans de la Révolution française, mais la défaite de 1870 face aux Allemands le fait basculer à droite, puis à l’extrême droite dans les années 1880 », rappelle l’historien Nicolas Lebourg.

Dans le discours politique, le terme est utilisé depuis des années par le Front national. Mais, depuis le début de la campagne, il apparaît chez d’autres candidats, à droite (François Fillon ou Nicolas Dupont-Aignan) comme à gauche (Jean-Luc Mélenchon ou Arnaud Montebourg). Interrogé sur la tonalité « plus patriote » de sa campagne, le tribun de La France insoumise indiquait récemment à 20 Minutes vouloir « reprendre des symboles [drapeau, Marseillaise] historiquement liés à la mouvance progressiste plutôt qu’à l’extrême droite ».

Aux meetings d’Emmanuel Macron, les drapeaux français (et européens) sont également largement distribués. « Dans la France post-attentat, on voit émerger un retour de ces deux patriotismes historiques, à travers l’utilisation du mot "patriote" et de ses symboles », reprend l’historien spécialiste du FN. « L’un à gauche, d’une France universelle ouverte sur le monde, qui est celui d’avant 1870. Et, de l’autre côté, le patriotisme qui reprend les codes de l’extrême droite de la fin du XIXe siècle avec le rejet de l’autre autant que le culte du nous. »

Mondialisme et nationalisme

En réalité, chaque candidat utilise le terme pour mieux attaquer son adversaire.

  • Emmanuel Macron oppose le « patriote » au « nationalisme » de Marine Le Pen.
  • Marine Le Pen oppose le « patriote » au « mondialisme » d’Emmanuel Macron.

« Je suis le candidat d’une France ouverte, ce qui me paraît être la définition même du patriotisme. Je suis l’ennemi du nationalisme, dont Madame Le Pen est la candidate », assurait Emmanuel Macron lors d’un entretien à 20 Minutes. Sa définition lui permet de fustiger le projet économique (protectionnisme, sortie de l’euro), et politique (priorité nationale, baisse de l’immigration) de la candidate frontiste pour mieux défendre son projet européen notamment.

De son côté, Marine Le Pen tente avec l’usage du mot « patriote » de séduire au-delà de son camp. Elle y oppose le libéralisme économique de son adversaire, ciblant « la mondialisation sauvage la plus brutale et la dérégulation notamment du droit du travail » pour capter l’électorat de gauche mais aussi « l’immigration massive, et la soumission et la fracturation en communautés » pour l’électeur de droite.