INTERVIEWPrésidentielle: «Le vote FN, un vote périurbain et rural»

Présidentielle: «Le vote FN, un vote périurbain et rural»

INTERVIEWEmmanuel Saint-Bonnet, spécialiste de la géographie électorale* et politologue indépendant analyse les premiers éléments du scrutin...
Un bulletin de vote Marine Le Pen.
Un bulletin de vote Marine Le Pen. - V. KESSLER / REUTERS
Propos recueillis par Maud Pierron

Propos recueillis par Maud Pierron

Quelle est la géographie électorale du vote Marine Le Pen?

La majeure partie de son électorat se trouve à l’est d’une ligne qui va du Havre à Perpignan. On retrouve le vote classique «des villas» dans le sud-est, le vote pied noir, le vote en Alsace. Mais on note que de plus en plus, le vote Front national s’ancre dans la France rurale et périurbaine. C’est un processus qui a débuté après 1995, car avant le vote FN était urbain, autour des cités notamment. A l’électorat traditionnel dans le sud-est, Marine Le Pen a ajouté une nouvelle couche, le vote de la désespérance sociale, comme dans le Nord ou les Ardennes.

Quelle est la spécificité de ces territoires?

Ce sont des territoires qui se sentent délaissés. Dans les zones périurbaines, ce sont souvent des villes-dortoirs, où les gens ont fui le centre-ville, parfois sous la contrainte, car le foncier est trop cher. La France rurale se paupérise et les services publics se font rares. Leur point commun, c’est que ce sont des zones qui sont secondaires sur le plan de la décision. Marine Le Pen parle d’un vote des «invisibles», je dirais plutôt des zones où il n’y a pas de poids politique, avec un sentiment de relégation.

Que peut-on dire de ce vote?

C’est un mini 21 avril dans l’impact, et un maxi 21 avril tant en nombre de voix qu’en pourcentages. Mais, je le dis à mes amis de gauche, qui sont choqués, ce n’est pas 20% de racistes. Il y a peut-être 5% de racistes et 15% de gens qui souffrent.

Peut-elle espérer pour les législatives?

Je ne pense pas qu’elle aura des élus. Il y aura probablement des triangulaires meurtrières pour la droite, qui feront passer la gauche. En 2002, il n’y a pas eu de vague FN. La droite ne sera pas éjectée. En plus, on sera au 3e et 4e tour donc une grande partie de l’électorat frontiste n’ira pas voter.

Nicolas Sarkozy peut-il espérer des réserves de voix?

Mathématiquement, oui. Mais avec le discours de Grenoble, il s’est tiré une balle dans le pied. Si la stratégie de Patrick Buisson avait fonctionné, Marine Le Pen ne serait pas au dessus de 15%. Finalement, ça a conforté les propos que tenait le FN depuis longtemps.

*: son blog à retrouver ici

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