INTERNETHadopi: C'est vraiment fini?

Hadopi: C'est vraiment fini?

INTERNETLa ministre de la culture Aurélie Filippetti a confirmé lundi sa détermination à réformer le dispositif de lutte contre le téléchargement illégal en marge de la présentation du rapport Lescure...
Claire Planchard

Claire Planchard

Moins de trois ans d’existence, à peine trente dossiers transmis à la justice, seulement deux condamnations… et la traque est déjà finie? Pas tout à fait. Lundi, Pierre Lescure, le président de la mission sur l’«Acte 2 de l’exception culturelle à l’ère numérique» a certes jeté un pavé dans la marre en proposant de supprimer la Hadopi, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet. Mais la chasse contre le téléchargement illégal n’est pas terminée.

Riposte transférée et allégée

Dans un souci d’économie budgétaire et de cohérence, le rapport Lescure préconise en effet de transférer la mission de la Haute Autorité au Conseil supérieur de l’audiovisuel. Et en particulier la mise en œuvre de la fameuse «riposte graduée », le système de dissuasion consistant à envoyer trois courriers de mise en garde aux internautes avant de saisir la justice.

«L’abrogation pure et simple de la riposte graduée n’est pas souhaitable car sa dimension pédagogique a fait la preuve de son efficacité avec une forte baisse du taux de récidive et de la fréquentation des réseaux de téléchargement de pair à pair» a salué lundi Pierre Lescure « Mais il faut un allègement pour abandonner les éléments les plus répressifs qui pouvaient conduire à une stigmatisation des internautes », estime-t-il.«La priorité des priorités est d’abroger la possibilité de suspendre la connexion à Internet», a confirmé lundi la ministre de la Culture. Saluant une « grande avancée démocratique», elle a confirmé qu’un projet de loi allant dans ce sens serait présenté dès le mois de juin.

Cette sanction pénale maximale sera ainsi remplacée par une sanction administrative pécuniaire. Une amende, dont le montant maximal de 1.500 euros actuellement pourrait être ramené à 60 euros «soit le montant de 15 films en vidéo à la demande » préconise le rapport Lescure, avec une possible majoration en cas de récidive. «Ce sera au législateur de décider de cette question», s’est contentée de préciser la ministre.

Un arsenal anti-piratage renforcé

Face à la banalisation du «piratage domestique», le rapport Lescure appelle également à «réorienter » l’arsenal anti-piratage vers «tous ceux qui font de la contrefaçon une activité lucrative», sites de streaming en tête, en mettant à contribution régies publicitaires, moteurs de recherche et hébergeurs.

Bonne joueuse, la présidente de l’Hadopi Marie-Françoise Marais a aussitôt annoncé se «réjouir» de ces recommandations. «Le maintien du dispositif de réponse graduée, débarrassé de certaines de ses contraintes, lui permettra de gagner en efficacité envers les comportements les moins graves. Pour les comportements les plus graves, les propositions de moyens plus efficaces de lutte contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle effectuées par d’autres solutions techniques que le pair à pair apportent un complément indispensable », détaille-t-elle dans un communiqué.

Un enthousiasme que ne partage pas l’association de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet la Quadrature du Net : «Derrière l'annonce d'une fausse mise à mort de l'Hadopi dont les missions sont simplement distribuées vers d'autres organismes (CSA), ou même complétées par de nouveaux dispositifs, se cache la poursuite des politiques anti-partage de Nicolas Sarkozy», a réagi sur son site un de ses co-fondateurs, Philippe Aigrain.