ECONOMIEPropositions du Medef: Un projet qui crée plus de remous que d’emplois?

Propositions du Medef: Un projet qui crée plus de remous que d’emplois?

ECONOMIESon plan «1 million d’emplois» dévoilé dimanche soir par «Les Echos» suscite un tollé chez les syndicats…
Claire Planchard

Claire Planchard

«Provocation» pour le leader de la CFDT, «outrance» pour celui de Force ouvrière: dans son document intitulé «Comment relancer la dynamique de création d’emploi en France?», le Medef avait pris soin de prévenir que «certaines propositions [apparaîtraient] certainement agressives ou caricaturales pour certains». Et assurait que l’objectif était «avant tout d’animer le débat». Il ne pensait pas si bien dire. Lundi, les syndicats ont unanimement dénoncé le projet et ses propositions les plus emblématiques, comme supprimer deux jours fériés, pouvoir déroger à la durée légale du travail ou au salaire minimum et lisser les seuils sociaux.

«Un document pas finalisé»

Face à ce tollé, le Medef a annoncé le report d’une semaine de la conférence de présentation de son plan initialement programmée ce mercredi. «Le Medef souhaite en effet soumettre au débat des propositions de nature économique et sociale et n'entend pas s'insérer dans une séquence politique», précisait lundi l’organisation dans un communiqué.

«Les vives réactions sont dues à un document qui n’est pas finalisé, qui vient troubler une semaine très chargée médiatiquement et politiquement [avec la déclaration de politique générale de Manuel Valls mardi et à la conférence de presse de François Hollande organisée vendredi]. Nous avons donc décidé de décaler la présentation d’une semaine pour présenter les choses clairement: on n’est pas dans le registre du démenti mais dans celui de la précision de taille», expliquait lundi à 20 Minutes un porte-parole du Medef.

«Lubies de lobbies»

Pas sûr toutefois que cela suffise à apaiser les tensions ou à convaincre. Sur le fond, les économistes interrogés par 20 Minutes restent dubitatifs sur l’efficacité des propositions avancées par l’organisation patronale. «Le Medef assure vouloir lever des tabous mais ce sont en réalité des débats ouverts depuis longtemps: ce sont des lubies de lobbies!», commente Gérard Cornilleau, économiste à l’OFCE. «De plus les chiffrages sont très fantaisistes: ni le travail le dimanche, ni la suppression de deux jours féries ne sont de nature à récréer significativement des emplois», estime-t-il. «La seule proposition à sauver dans ce plan serait la fusion du CICE avec des baisses de charge: elle va dans le sens d’une simplification et d’une pérennisation du dispositif à l’heure où les entreprises sont dubitatives sur un crédit d’impôt qui peut être remis en cause tout le temps et qui apporte une complication administrative».

Dans le contexte français d'instabilité juridique, je ne pense pas que l'effet sur l'emploi [de ces mesures] serait important. Mais on pourrait expérimenter cela pour les start-up dans les nouvelles technologies», estime pour sa part Etienne Wasmer, professeur d’économie à Sciences Po. Pour lui aussi, seule « la pérennité des réformes» permettra une «inflexion substantielle de l'emploi»: «Il faut que la direction soit claire. Presque plus important que la nature de la réforme, c'est qu'elle soit ambitieuse et ne soit pas remise en cause l'année suivante.» Et de prévenir: «On peut dépenser des milliards en allégements de charge, s'ils sont susceptibles de disparaître, les créations d'emploi ne seront pas programmées».