Céréaliers franciliens: Les raisons de la colère
FISCALITÉ•e gouvernement fait face à un nouveau mouvement social...Bertrand de Volontat
L’annonce de remise à plat de la fiscalité formulée mercredi par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault n’a pas calmé la grogne. Dans la lignée des «bonnets rouges» bretons contre l’écotaxe, la fronde sociale continue. Cette fois, c'est au tour des agriculteurs, et notamment des céréaliers, de manifester. Emmenés par la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles d'Ile-de-France (FDSEA) -branche régionale du syndicat agricole majoritaire FNSEA- et la section régionale des Jeunes Agriculteurs (JA), ils ont organisés ce jeudi des barrages filtrants, aux entrées de Paris.
«Nous avons conscience que ce blocus va pénaliser les travailleurs franciliens. Nous le faisons à contrecœur, comme un dernier recours», explique au Figaro Grégoire de Meaux, président des JA d'Ile-de-France. Des ardeurs que la mort d’un pompier dans une collision entre une voiture et un poids lourd ce matin sur un des barrages a rapidement refroidies.
La PAC, raison principale de la grogne
Ils protestent principalement contre la redistribution, dite «plus juste» et décidée par le gouvernement en octobre, des aides européennes entre céréaliers et éleveurs, au profit de ces derniers, à la faveur de la nouvelle politique agricole commune (PAC). Et notamment une disposition, défendue par la France, qui consiste à sur-doter les 52 premiers hectares, pour avantager les petites exploitations, qui constituent un important bassin d’emploi. Mercredi, le Parlement européen a adopté définitivement cette nouvelle PAC dans le cadre d'un budget en baisse. Rompant ainsi avec le précédent modèle, où environ 80 % des paiements étaient alloués à 20 % des exploitations. Sur la période 2015-2020, 7,7 milliards d'euros d’aides directes seront alloués à la politique agricole française et 1,4 milliard d’aides pour le développement rural. «J'ai fait ce choix d'un rééquilibrage des aides vers l'élevage, il n'est pas question de revenir dessus, c'est très clair», a dit le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll ce jeudi.
La grogne des plus fortunés
Jean Glavany, député PS et ex-ministre de l'Agriculture, a qualifié jeudi de «vrai scandale que ceux qui touchent le plus bloquent les routes». Les revenus des agriculteurs franciliens ont en effet explosé, grâce aux prix des céréales, qui ont pris 20%, s’élevant à 97.800 euros en 2012 (contre 59.600 euros en 2011) contre 38.300 euros pour le revenu moyen des exploitations agricoles françaises. «Si les cours baissent, nombre d'entre nous mettront la clé sous la porte si les aides européennes baissent autant que le souhaite le gouvernement, poursuit Grégoire de Meaux. Nous réclamons que ces aides soient modulées en fonction des cours». Enfin, sur fond de baisse générale du bataillon d'agriculteurs en France, le nombre des exploitations de céréales est passé de 49.500 en 2000 à 51.400 en dix ans.
La fronde fiscale pour rassembler
Les agriculteurs franciliens s’élèvent en outre contre la sur-fiscalisation, surfant sur la vague contestataire actuelle et grossir leurs rangs. Ils veulent faire annuler la hausse de la TVA de 7% à 20% sur les engrais et les pesticides ainsi que sur les activités de prise en pension de chevaux, prévue au 1er janvier 2014. «Nous allons devoir augmenter nos tarifs», préviennent-ils. Dans la foulée ils entendent faire annuler la baisse de 30 % des exonérations de charges sociales sur les travailleurs saisonniers. Ils critiquent aussi le relèvement de l'assiette de la taxe carbone, les programmes environnementaux et vont même jusqu’à réclamer le limogeage du ministre de l'Agriculture pour «incompétence notoire».