VOS QUESTIONSVous avez interviewé Jean-David Chamboredon, porte-parole du collectif des «Pigeons»

Vous avez interviewé Jean-David Chamboredon, porte-parole du collectif des «Pigeons»

VOS QUESTIONSL'entrepreneur a répondu à vos questions...
Claire Planchard

Claire Planchard

[Le chat est terminé]

Conclusion: Merci à tous pour vos questions en espérant y avoir répondu correctement ;-)

Le mouvement des «Pigeons» est une anecdote de l’histoire mais il préfigure une forme de démocratie participative rendue possible par les outils du web. C’est assez normal que ce soient les web-entrepreneurs qui aient lancé cette nouvelle forme de débat. Elle est cependant ouverte à tous...

Pour conclure, je dirais juste que la France détruit environ 9.000 emplois par jour tout en créant 8.000 nouveaux. Il faut inverser cette tendance et les entreprises du numérique à condition qu’elles soient bien financées peuvent aider à réduire une petite partie de ce «gap» (10-20%)…
Le reste viendra, c’est certain, des TPE/PME/ETI (Entreprises de taille intermédiaire) de tous les secteurs et favoriser le financement/développement au sens large de toutes ces entreprises devrait être une priorité nationale! Je crois que François Hollande l’a compris mais sa politique manque encore cruellement de cohérence en la matière.
Un chef d'entreprise désabusé: Nous gérons une TPE en bâtiment. Nous avons été taxés de manière exagérée depuis le 1er janvier au niveau RSI. Aujourd'hui, nous perdons 200 euros par mois sur nos revenus et lorsque nous réussissons, après de très nombreux efforts, à avoir un bénéfice, nous perdons l'équivalent de 7.000 euros (calcul fait sur nos 2 précédentes années). Nous gagnons le même salaire que notre ouvrier. Si nous perdons notre entreprise, nous perdons tout! Que comptez-vous faire pour changer cette situation? Comment permettre aux entreprises de se développer?
Concernant le RSI, voir ma réponse à med61. Concernant votre entreprise, c’est très difficile de répondre à votre question. Quel en fait votre problème numéro 1? Manquez-vous de clients ? Prenez-vous des commandes non ou peu rentables pour «survivre»?
med61: Le RSI n’est-il pas la mère des «Pigeons»? Ce régime inadapté ponctionne bien trop d'argent sur les TPE. C'est affolant, j'ai du mettre la clé sous la porte devant leurs menaces de me prélever des sommes importantes. C’est impossible de tenir à ce rythme...
Le RSI a effectivement des pratiques très désagréables voire indignes. C’est un sujet qui est remonté lors de l’épisode «Pigeons» à de très très nombreuses reprises via des travailleurs non salariés. Malheureusement, tous les sujets liés aux régimes sociaux ont été exclus du champ des Assises de l’Entrepreneuriat... Cet organisme ainsi que la CIPAV oublient clairement que les cotisants sont quelque part leurs clients ;-)
Audrey: Vos revendications ne semblent-elles pas loin des revendications des artisans commerçants ou patrons de PME qui sont dans une logique de transmission familiale de leur entreprise et non de spéculation?
C’est tout à fait exact que les artisans et patrons de PME traditionnelles n’ont pas les mêmes enjeux que les start-ups mais ce n’est pas pour autant qu’il faut parler de spéculation! Par définition, les start-ups correspondent à de nouvelles activités, à des sociétés jeunes, à des potentiels de croissance très élevé... Tout ceci est bon pour l’économie, la création d’emplois (notamment chez les jeunes)... Les actionnaires des start-ups restent actionnaires en moyenne 7 ans... Parler de spéculation est erroné!
Anakin62: Quels efforts les entrepreneurs sont-ils prêts à réaliser pour participer à l’effort commun? Quelle est la part de «patriotisme» dans la décision d'un entrepreneur d'investir en France ou de partir?
La motivation d’un entrepreneur c’est avant tout de voir grandir son «bébé». Ceci s’accompagne le plus souvent de créations d’emploi. C’est sans doute la contribution la plus significative de l’entrepreneur à l’effort national: derrière chaque emploi, il y a de la TVA, des charges sociales et parfois des bénéfices imposables...
emploi
La motivation d’un entrepreneur c’est avant tout de voir grandir son «bébé». Ceci s’accompagne le plus souvent de créations d’emploi. C’est sans doute la contribution la plus significative de l’entrepreneur à l’effort national: derrière chaque emploi, il y a de la TVA, des charges sociales et parfois des bénéfices imposables...
Personnellement, j’ai vu grandir le web français depuis 15 ans. J’ai envie qu’il rivalise avec le web anglais ou allemand. Je ne sais pas si c’est du patriotisme mais il s’agit bien d’une compétition et je veux que nous figurions en très bonne place: n°1 en Europe? Dans le top 5 mondial?
Marie: Vous parlez souvent de «prise de risque» et de sa juste rémunération. En quoi un entrepreneur prend-il des risques et pourquoi cela serait-il bon pour l’économie?
L’entrepreneur fait d’abord prendre des risques à des investisseurs qui misent sur son entreprise au risque de tout perdre. Ensuite avec le capital dont il dispose, il prend des risques en embauchant et en lançant une nouvelle activité. C’est comme cela que la croissance dont nous manquons tant peut revenir... Très souvent, dans les très jeunes entreprises, l’entrepreneur ne se rémunère pas et travaille énormément alors qu’il aurait peut-être pu choisir une voie plus facile. Il n’a d’ailleurs pas droit au chômage s’il se plante... Tout ceci représente des «prises de risque» , non?
Un chef d'entreprise désabusé: Comment faire comprendre au gouvernement que nous ne sommes pas de grosses entreprises du CAC 40 et pourquoi nous avoir puni des abus des grosses sociétés?
Votre observation est tout à fait correcte. Le gouvernement via la loi de Finances 2013 voulait taxer la spéculation et la rente et il a entravé l’investissement productif... Il y a une grande méconnaissance dans le monde politique de la réalité des TPE/PME/ETI (Entreprises de taille intermédiaire). Le mouvement des «Pigeons» a été l’occasion de faire de la pédagogie sur le sujet particulier du financement en fonds propres. Il y a bien sûr plein d’autres sujets à adresser. Pour n’en prendre qu’un: puisque certains grands patrons se sont «goinfrés» de stock option, la fiscalité de l’actionnariat salarié est très défavorable... C’est tout à fait dommage!
bach: Ancien chef d'entreprise de gauche, qui a connu les taux d’intérêts à 11% /12%, des charges aussi élevées que maintenant, des crises pétrolières très dures, je constate que vous êtes libéral pour les bénéfices et socialiste pour les pertes. Pourquoi cette attitude de quémander sans cesse?
Je n’ai pas l’habitude de «quémander» et je n’encourage jamais les entreprises dans lesquelles je suis impliqué à courir après les subventions, aides ou autres. Ce que réclament les «Pigeons» et les entrepreneurs en général, c’est un cadre simple, stable et compétitif... Il ne s’agit en aucun cas de «faire la manche»!
65acim: Beaucoup de petits entrepreneurs et des patrons de PME ont été sensibles à votre action. Une continuité politique à votre mouvement est-elle à prévoir pour défendre, au final, l’intérêt de beaucoup de Français?
Les entrepreneurs et entreprises Français sont représentés par de multiples associations et par plusieurs syndicats dits «patronaux». Cette multiplicité correspond à la réalité économique très différente d’un secteur à l’autre mais ne favorise pas un dialogue simple avec les pouvoirs publics. Les «Pigeons» sont toujours vigilants mais n’ont pas vocation à s’organiser en un mouvement supplémentaire... Le dialogue instauré lors des Assises de l’Entrepreneuriat a été exemplaire. Il doit continuer...
Kittie: Pensez-vous que votre mouvement a changé l’image que les Français se font des entrepreneurs? Au contraire, ne l’a-t-il pas dégradé?
Je pense que les Français font parfaitement la différence entre les entrepreneurs et les grands patrons. Un sondage fait durant l’épisode des «Pigeons» montrait un taux de support de 76% des Français vis à vis des entrepreneurs...
sondage
Je pense que les Français font parfaitement la différence entre les entrepreneurs et les grands patrons. Un sondage fait durant l’épisode des «Pigeons» montrait un taux de support de 76% des Français vis à vis des entrepreneurs...
Par contre, les entrepreneurs sont très variés. Ils sont des millions en France. Ils n’ont pas tous les mêmes problématiques. Le mouvement des «Pigeons» est né de la communauté des entrepreneurs du web qui ont un besoin crucial de capital pour lancer/développer leurs activités. Le débat sur la taxation des plus-values reposait à la fois sur le caractère confiscatoire pour l’entrepreneur mais aussi sur le caractère dissuasif pour les investisseurs personnes-physiques (type business angel). Ce second point moins médiatisé est sans doute plus important.
Le mouvement a pu être caricaturé mais les décisions prises par le Président de la République après une longue et large concertation montre que la «cause était juste».
TruketMuche: N’est-ce pas un problème que ce soient retraités et salariés qui payent les impôts à votre place?
Le mouvement des «Pigeons» n’a jamais demandé à ne pas payer d’impots. Les annonces faites par le Président prévoient à la fois une taxation entre 23,75% et 62,2% et la suppression des niches qui pré-existaient... On ne peut pas parler d’exonération fiscale ;-)
Par ailleurs, le schéma fiscal voté fin 2012 était tellement dissuasif que les recettes fiscales auraient été plus que modestes. Je suis sûr que ce nouveau schéma rapportera plus à l’Etat.
Enfin, lorsqu’une personne physique investit dans une entreprise, celle-ci paie impôts et charges sociales avec l’argent qu’elle a reçu. Sans investissement, ces impôts et charges sociales n’existeraient pas du tout...
65acim : Conseillez-vous à un jeune qui monte son entreprise de délocaliser son siège social à l'étranger?
Je fais partie, avec mes associés, des gens «qui restent en France». J’encourage les entrepreneurs à le faire. A l’inverse, si un projet ne trouve pas de financement en France ou si des investisseurs internationaux n’acceptent de financer un projet que si celui est implanté en dehors de France, je comprends les entrepreneurs qui «partent». Il y a toujours eu des départs, le problème d’aujourd’hui c’est qu’il y en a beaucoup trop :-(
Xavier: Vous avez déclaré, suite aux Assises de l’Entrepreneuriat, être satisfait de plusieurs mesures envisagées par le gouvernement. Ces mesures sont-elles de nature à relancer le processus d’investissement par les business angels (processus bloqué depuis quelques mois) et envisagez-vous de structurer
le mouvement des «Pigeons» afin de vérifier la concrétisation de ces mesures sur le terrain?
Les annonces faites par le Président de la République sur la taxation des plus-values de cession font que la France redevient un pays «presque normal» en la matière. En fonction de la durée de détention et du type de situation, la taxation va de 23,75% à 62,2% contre une moyenne européenne à 26%. Les investisseurs de moyen-long terme que sont les business angels devraient retrouver un niveau de taxation équivalent voire inférieur au taux fixe précédent (34,5%). Ils espèrent évidemment que la promesse du Président vaut «force de loi».
Les «Pigeons» n’ont pas vocation à perdurer mais nous resterons vigilants sur la mise en oeuvre de ces propositions. Pour ma part, je suis également administrateur de France Digitale qui représente les investisseurs et les entrepreneurs du web. Cette association a été fortement mobilisée lors des Assises de l’Entrepreneuriat et a vocation à le rester sur les étapes suivantes...

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Présentation du chat:

De la fronde lancée fin septembre 2012 sur Internet par des entrepreneurs numériques contre le projet de taxation des plus-values du gouvernement, aux Assises des entrepreneurs qui viennent d’aboutir à une série de propositions du président de la République leur donnant en grande partie satisfaction, Jean-David Chamboredon, investisseur professionnel et instigateur involontaire du collectif des «Pigeons» revient sur la genèse du buzz et les revendications du mouvement dans le livre Génération Pigeons publié jeudi 2 mai aux éditions Michalon.