HISTOIRE«Titanic», une légende insubmersible

«Titanic», une légende insubmersible

HISTOIRECent ans après, la fiction a-t-elle occulté la réalité historique?...
Anne Kerloc'h, Alice Coffin et Joël Métreau

Anne Kerloc'h, Alice Coffin et Joël Métreau

Un orchestre qui aurait joué «Plus près de toi mon Dieu» pendant que le paquebot sombrait. Des passagers de troisième classe qui auraient été sciemment sacrifiés pour laisser la place aux riches dans les canots. La catastrophe du Titanic a très vite engendré sa propre fantasmagorie.

«L'exemple type du sujet qui se développe à travers la rumeur, la légende, lance l'historien Gérard A. Jaeger, auteur d'Il était une fois le Titanic (l'Archipel), tout simplement parce qu'il n'y a pas eu d'image ou de description précise du drame, seulement des témoignages, contradictoires.» Cent ans après le naufrage du 14  avril 1912, la vérité historique se heurte à une représentation fictionnée aussi massive que l'ombre du paquebot.

Un spectacle tragique

Dernier exemple en date, TMC va diffuser la mini-série «Titanic» présentée au MIPTV de Cannes: «Il y a très peu de romans mais beaucoup de films, note Gérard A. Jaeger, un des premiers, Saved From the Titanic, étant joué par Dorothy Gibson, actrice… et rescapée de la catastrophe.» Le phénomène culminera avec le film de Cameron, qui ressort en 3D ce mercredi. «A quel moment le récit de l'histoire devient-il la mémoire en elle-même?», s'interroge le réalisateur dans James Cameron: la vérité sur le Titanic, sur National Geographic Channel le 8 avril.

Dans ce doc inédit, des experts montrent comment le film contenait des erreurs, comme l'angle d'inclinaison du navire lorsqu'il coule (estimé à 23° et non à 90°), ou la couleur des fusées de détresse (multicolores et non juste blanches). Pour Celia Imrie (Grace Rushton dans la mini-série «Titanic»): «Cette histoire est fascinante. A tel point qu'un équipage va faire le même trajet. Vous vous rendez compte du côté morbide.»

Difficile de ne pas laisser l'imagination dériver sur le Titanic, qui coule lors de son premier voyage, comme si une force supérieure souhaitait punir l'arrogance des hommes. «L'impact est aussi fort que le 11 septembre 2001, d'autant que ce drame a lieu à la charnière du XXe siècle, alors qu'une autre société se dessine, que les barrières entre les classes sociales vont bouger», souligne Jaeger. Sont engloutis dans les eaux glacées les fastes d'un paquebot gigantesque et luxueux, sur lequel ont embarqué immigrants, mais aussi capitaines d'industrie et riches héritiers. La fin d'un monde ancien, fin terriblement spectaculaire.