RETROFUTURISMEEt si le Centre Pompidou ouvrait ses portes aujourd’hui?

Le Centre Pompidou a 40 ans: Et si le musée polémique ouvrait ses portes aujourd’hui?

RETROFUTURISMEPour son 40e anniversaire, «20 Minutes» imagine les réactions et polémiques que susciterait l’ouverture du Centre Pompidou en 2017…
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

La réconciliation entre Kim Kardashian et Paris à un nom : le Centre Pompidou. A l’occasion de l’inauguration du tout nouveau musée parisien, le 31 janvier 2017, la star est revenue à Paris malgré la terreur que lui inspire encore la ville moins de quatre mois après son agression. Adepte de l’architecture de Renzo Piano et d’art contemporain, Kim Kardashian a pris un selfie devant l’emblématique bâtiment qui a aussitôt fait le tour de la planète.

Kim Kardashian serait réconciliée avec Paris si le Centre Pompidou avait 40 ans de moins
Kim Kardashian serait réconciliée avec Paris si le Centre Pompidou avait 40 ans de moins - tweetfake

Evidemment, ceci n’est pas vraiment arrivé. Le Centre Pompidou n’a pas été inauguré en 2017 mais en 1977, il y a tout juste quarante ans. Musée d’un nouveau genre, installé dans un bâtiment à l’architecture audacieuse, et consacré à l’art moderne et contemporain, le Centre Pompidou accueillait également un centre de documentation, un institut de recherche en acoustique (l’Ircam), une bibliothèque de lecture publique (la BPI, première du genre en Europe), des salles de spectacles…

« Un travail de pédagogie »

On trouve assez peu de traces des débats qui ont parcouru la société française autour de l’ouverture de ce musée imaginé et souhaité par le président de la République Georges Pompidou avant sa mort en 1974. « On revoit souvent les archives de journaux télé avec des microtrottoirs de Parisiens qui trouvent le bâtiment hideux, note Muriel Lescaut, historienne de l’art spécialiste des musées. Mais à l’époque, il y avait un consensus contre ce musée au-delà du geste architectural. Ou au mieux un désintérêt. C’étaient les années Giscard, l’art contemporain avait une mauvaise image. La plupart des gens ne voyaient pas à quoi servirait un pareil lieu. Même les artistes étaient circonspects, ils ne voulaient pas être muséifiés de leur vivant, ils avaient une méfiance vis-à-vis de l’institution. »

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Yves Robert, directeur du Centre National des Arts plastiques, n’est pas sûr que le Centre Pompidou serait mieux reçu en 2017 qu’il ne l’a été en 1977 : « L’art contemporain a pour fonction, entre autres choses, d’être déstabilisant et dérangeant. Il y a un travail de pédagogie qui est et sera toujours à l’œuvre auprès du grand public. Parce que les publics changent, ce ne sera jamais abouti, jamais acquis. »

Observateur privilégié des débats qui agitent la société de 2017, 20 Minutes a essayé d’imaginer comment serait vécue l’inauguration du Centre Pompidou si elle avait lieu le 31 janvier 2017.

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Le titre de notre article pourrait être…

« Fachosphère, automobilistes, féministes… Le Centre Pompidou fait la quasi-unanimité contre lui »

La naissance du Centre Pompidou s’est faite dans la douleur. Avant même son inauguration officielle aujourd’hui, mardi 31 janvier 2017, le tout nouveau Musée national d’Art moderne a essuyé de nombreuses polémiques et critiques. Au rayon des polémiques, Marine Le Pen s’est emportée début janvier contre une « gabegie financière sans précédent, à l’heure où notre patrimoine tombe en ruines, où l’on ferme les écoles des villages et alors qu’il manque des milliers de places de prison. » La candidate à l’élection présidentielle persifle également sur « l’européisme à marche forcée », selon elle véhiculé par les artistes représentés au Centre Pompidou.

Sans aller jusqu’à l’opposition frontale, l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle 2017 a boudé les visites pré-inaugurales de la semaine dernière, de peur d’être associé au tollé.

D’autres en revanche, n’ont pas manqué le rendez-vous. Il y a dix jours, le collectif Osez le féminisme avait organisé une impressionnante manifestation. Plusieurs centaines de femmes nues se sont rassemblées sur le parvis du Centre Pompidou en entonnant le slogan « Je ne suis pas ta muse » pour protester contre le faible pourcentage d’œuvres d’artistes femmes exposées dans le musée. Deux jours plus tard, l’association internationale Vegan Attack a utilisé une dizaine de drones afin de larguer des litres de faux sang sur le toit du Centre Pompidou, stigmatisant « une institution qui veut incarner le futur mais sert des morceaux d’animaux massacrés à ses plus riches visiteurs dans son restaurant. »

La fachosphère en ordre de bataille

Alain Finkielkraut, que l’on ne peut pas suspecter de sympathie à l’égard des causes féministes ou antispécistes, s’est également emporté contre le Centre Pompidou et dénoncé « une direction à l’antisémitisme rampant » après ne pas avoir été invité au colloque inaugural organisé en décembre 2016 par le musée. Le philosophe fait partie des signataires d’une tribune parue ce week-end dans le JDD, voyant dans le Centre Pompidou « une vision mortifère de l’art ». Parmi les cosignataires, Michel Houellebecq a déclaré : « Que c’est laid ! Si on en faisait cadeau à Bachar al-Assad ? »

Michel Houellebecq aurait sans doute paraphrasé Barjavel à propos du Centre Pompidou
Michel Houellebecq aurait sans doute paraphrasé Barjavel à propos du Centre Pompidou - faketweet

Cette tribune d’une partie de l’élite intellectuelle du pays rejoint le propos de la fachosphère qui s’en donne à cœur joie depuis plusieurs jours. Ont fleuri sur Twitter les mots-dièses #GhaziPompidou #ArtChrétienPasContemporain #ArtComptantPourRien #Mochepidou… Sur Instagram, des internautes se prennent en photo faisant semblant de vomir à la vue du Centre Pompidou. Le filtre Snapchat « CentreVomitou » fait fureur, il permet de faire figurer une flaque de vomi à vos pieds pour vos selfies devant une œuvre d’art.

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Mais tout cela n’était rien au regard des nombreuses perturbations qui ont marqué le jour de l’inauguration officielle, hier, à la veille de l’ouverture au public. L’association des automobilistes de Paris avait organisé une opération escargot dans la rue Beaubourg, empêchant de nombreux invités d’arriver à temps. L’association n’a jamais accepté que le musée soit construit en lieu et place d’un immense parking. « Il faudra bientôt aller dans les arrondissements à deux chiffres pour pouvoir se garer, s’étrangle Otto Mobile, président de l’association. La piétonnisation est la gangrène qui tuera notre ville ! Pour aller de Bastille à la Concorde, j’ai meilleur compte de passer par le périphérique, c’est ubuesque ! »

Le musée qui se fait sonner les cloches

En début de soirée, alors que les officiels débutaient leur discours, les cloches de Notre-Dame ont sonné le tocsin. Le diocèse de Paris a officiellement exprimé ses regrets et promis qu’une enquête serait diligentée pour savoir comment ce « piratage » avait pu être possible. Une source proche de l’enquête indique d’ores et déjà qu’il s’agirait d’une action de catholiques intégristes qui ont bénéficié d’une aide logistique au sein même de la cathédrale. Le compte Twitter de la Manif pour tous a diffusé une vidéo qui semble avoir été réalisée au plus près des cloches pendant l’incident, avant de la retirer dans la soirée.

La date choisie pour l’inauguration du Centre Pompidou a également fait grincer quelques dents, à commencer par celles de Christian Estrosi qui a publié ce matin un tweet rageur. Le 31 janvier est en effet l’anniversaire du rattachement de Nice à la France.

Christian Estrosi aurait souhaité une autre date pour l'inauguration du Centre Pompidou 2017
Christian Estrosi aurait souhaité une autre date pour l'inauguration du Centre Pompidou 2017 - faketweet

Un collectif de hackers a par ailleurs piraté le site internet du musée annulant les milliers de réservations pour les premiers jours d’ouverture. Selon plusieurs observateurs, le collectif entendait ainsi également protester contre le choix du jour de l’ouverture, anniversaire de la mort de Guy Fawkes, dissident britannique exécuté en 1606 pour son rôle dans la Conspiration des poudres, et devenu l’un des symboles des hackers du collectif Anonymous.

Les Anonymous se vantent d'avoir hacké le site du Centre Pompidou 2017
Les Anonymous se vantent d'avoir hacké le site du Centre Pompidou 2017 - faketweet

Même Trump s’en mêle

En ce jour d’ouverture officielle, les revues de presse internationale saluent la grande réussite du musée mais font aussi mention du satirique Gérard de l’architecture remis à Renzo Piano et des nombreuses pétitions d’associations de commerçants riverains du musée. Une pétition sur Change.org a ainsi été particulièrement relayée, un groupe y réclame ironiquement que Le Louvre soit repeint en bleu, rouge et vert pour ne pas dépareiller avec le Centre Pompidou. Sur l a plateforme de crowdfunding Ulule, la campagne « Pour acheter un goût aux responsables du Centre Pompidou » a déjà récolté 587.000 euros.

Même le tout frais président des Etats-Unis Donald Trump a tweeté pour se moquer du Centre Pompidou : « La France ouvre un musée tape-à-l’œil et ses frontières aux terroristes. C’est de mauvais goût ! Faux art ! Perdants ! » Il pourrait s’agir d’un début de crise diplomatique : François Hollande a convoqué l’ambassadeur des Etats-Unis mercredi matin pour avoir des explications.

Donald Trump créé un incident diplomatique à cause du Centre Pompidou 2017
Donald Trump créé un incident diplomatique à cause du Centre Pompidou 2017 - tweetfake

La vox populi unanime

En France, les journaux ont largement relayé la grogne populaire ce mardi matin. Buzzfeed a trouvé « 21 raisons de détester le Centre Pompidou », Valeurs actuelles a publié un supplément spécial sur « Le Centre BOBOpidou », Le Figaro titre en Une « Le vrai coût du Centre Pompidou, plus cher musée de l’histoire de France », Sciences & Avenir affirme « Le cerveau humain n’est pas configuré pour survivre à une visite du Centre Pompidou »… A la télévision, Cyril Hanouna a fait scandale en déclarant : « L’art contemporain c’est pour les pédés ! » alors que Mathieu Delormeau disait son admiration pour le musée.

Avec tout cela, le premier jour d’ouverture au public du Centre Pompidou, demain mercredi 1er février, promet d’être morose. Et en plus, il va pleuvoir.