«Hitchcock/Truffaut»: La rencontre expliquée à ceux qui n'y connaissent rien en cinéma
CINÉMA•Arte diffuse ce lundi un documentaire sur l'entretien mythique entre François Truffaut et Alfred Hitchcock qui a donné lieu à un livre de référence...Fabien Randanne
Une leçon de cinéma de 80 minutes. C’est la promesse que tiendra Arte, ce lundi, à 20h55, en diffusant Hitchcock/Truffaut. Ce documentaire signé Kent Jones retrace la rencontre mythique entre les deux réalisateurs, au début des années 1960. Celle-ci s’est matérialisée en un livre d’entretien de 300 pages qui trône aussi bien dans la bibliothèque de Martin Scorsese, David Fincher et des autres cinéphiles du monde entier. Que ceux qui ont à peine vu La Mort aux trousses et Les Oiseaux se réjouissent : Hitchcock/Truffaut peut faire office de version Reader’s Digest du bouquin. Mais ce retour dans l’œuvre du maître du suspense, construit autour d’extraits de films et d’enregistrements audio de son entretien fleuve avec Truffaut, donne surtout envie de se plonger dans le « Hitch Book ». Et pour ceux qui ont peur d’être perdus, 20 Minutes livre les jalons de cette rencontre qui a marqué l’histoire du cinéma.
>> Voir un extrait du documentaire :
- Alfred Hitchcock méprisé mais prisé par François Truffaut
Alfred Hitchcock est un grand réalisateur. Aujourd’hui, qui se hasarderait à dire le contraire ? Mais, à l’époque de la sortie de L’homme qui en savait trop, Fenêtre sur cour ou Psychose la critique le considérait, au mieux, comme un habile réalisateur de divertissement. Dans les années 1950, Claude Chabrol, François Truffaut ou Eric Rohmer, alors critiques aux Cahiers du cinéma, ont été les premiers à ériger son piédestal. Ça n’a l’air de rien dit comme ça, mais c’est un peu comme si aujourd’hui les critiques les plus pointus acclamaient Michael Bay, le réalisateur de Transformers et Armageddon, en louant son talent visionnaire et sa maîtrise technique.
- Pour François Truffaut, Alfred Hitchcock est un auteur
Pour certains, l’expression « cinéma d’auteur » évoque le combo « dialogues dépressifs dans un meublé sous les toits » ou, plus largement, tout ce qui entre dans la case « films chiants ». Ce n’était pas du tout cela que François Truffaut avait en tête lorsqu’il a conceptualisé la « politique des auteurs ». Pour résumer, un réalisateur est un auteur lorsqu’il a le contrôle sur ses films, qu’il y appose sa patte, et que son œuvre est constituée de thèmes et de motifs récurrents. Alfred Hitchcock, avec – entre autres – son goût pour les histoires d’innocents accusés à tort et un certain fétichisme de la blondeur est donc l’un des premiers à avoir été qualifié d’auteur.
- François Truffaut et Alfred Hitchcock se retrouvent à Los Angeles
En 1962, François Truffaut est déjà bien connu pour avoir réalisé Les Quatre cents coups et Jules et Jim. Il n’empêche, c’est un peu en fanboy qu’il s’entretient avec Alfred Hitchcock. La rencontre a été rendue possible par leur amie commune, l’Américaine cinéphile Helen Scott, qui a joué les entremetteuses et les traductrices. Tous trois se sont retrouvés de huit à dix heures par jour dans un bungalow des studios Universal, à Los Angeles. Quelque cinq cents questions ont fusé. De quoi laisser songeur la génération Ask.fm.
- Le livre de chevet des cinéphiles
Le livre, sobrement intitulé Hitchcock Truffaut (parfois désigné simplement sous le titre Hitchcock), est publié en 1966. Chaque film du maître du suspense est évoqué en détail. Ce making of de plus de 300 pages s’impose instantanément comme la Bible de tout cinéphile se revendiquant comme tel. Au fil des rééditions et des traductions, il s’est écoulé à des millions d’exemplaires.
- Le début d’une longue amitié
François Truffaut et Alfred Hitchcock ont continué la conversation, en privé, dans les années qui ont suivi. Les deux hommes ont entretenu leur amitié au fil des ans. « Hitch » ne manquant jamais de saluer son ami français lors de ses passages à Paris.
En 1979, Alfred Hitchcock est récompensé par l’American Film Institute pour l’ensemble de son œuvre. Pour l’occasion, c’est François Truffaut qui lui rend hommage sur scène. Quelques mois plus tard, Sir Alfred meurt à 80 ans. Son ami français disparaîtra à son tour, quatre ans plus tard, à l’âge de 54 ans.