Pour Paul Verhoeven, le réalisateur de «Basic instinct», «Jésus Christ n'était pas un dieu»
LIVRE•Le réalisateur se penche sur la vie du Jésus dans un essai érudit, mais surprenant, voire choquant...Caroline Vié
On n'avait plus entendu parler de Paul Verhoeven depuis Black Book (2006), le réalisateur hollandais connu pour le sulfureux Basic Instinct (1992) et le réjouissant Starship Troopers (1997) est de retour en pleine forme. A peine avait-il fini de tourner Elle, thriller inspiré de Philippe Djian mettant en scène Isabelle Huppert à Paris qu'il est venu présenter son nouveau bébé: Jésus de Nazareth (éditions Aux Forges de Vulcain), un essai fort sérieux, mais déroutant, sur la vie du Christ. Cela fait vingt ans que le réalisateur essaye de monter un film sur le sujet.
Un livre polémique et érudit
Le cinéaste de 76 ans a fait énormément de recherches et participé à des séminaires théologiques érudits pour ce projet tombé à l'eau faute de capitaux... «N'étant pas croyant moi-même, j'ai essayé de démêler le vrai du faux entre les différents récits concernant Jésus. Toutes sortes de versions des faits sont disponibles dans les Ecritures, qui n'ont pas toutes été écrites à la même époque et dont aucune n'émane de témoins directs. Les évangiles, par exemple, ont été écrits quarante ans après la mort du Christ», explique-t-il. Ce qu'il révèle peut surprendre. Voire choquer. «Jésus n'était pas un dieu, mais un guérisseur et un meneur d'hommes», dit Paul Verhoeven.
Un provocateur brillant
La couverture française du livre, qui se veut très sérieux rappelons-le, annonce la couleur. Le Christ y est représenté en Che Guevara. «Les deux avaient beaucoup de points communs, insiste Verhoeven. Ils voulaient le bien des autres et ont été trahis puis exécutés pour leurs idées». Après toutes ces années de recherches passionnées, le réalisateur ne croit toujours pas en Dieu. «Pour moi, Jésus n'est pas une divinité mais un guérisseur à l'état d'esprit assez proche des résistants pendant la Seconde Guerre mondiale. Il avait un côté terroriste et c'est pour cela qu'il est mort. Il dérangeait les Romains dont il mettait l'hégémonie en péril.»
Le cinéma dans la peau
Dans le livre, Paul Verhoeven décrit la première scène du film qu'il souhaite tourner au cinéma: un gros plan sur les pieds d'un crucifié s'ouvrant progressivement sur une forêt de croix, avant que Marie soit brutalisée par un soldat, un viol qui expliquerait la conception de Jésus... Le cinéaste déclare ne pas avoir renoncé à son projet de long-métrage. «Je compte le réaliser en Europe car aux Etats-Unis, je me ferais massacrer», plaisante-t-il. Saïd Ben Saïd, producteur de Elle et de Maps to the Stars (David Cronenberg, 2014) l'aidera à concrétiser sa vision. En attendant le film, on a déjà le livre qui donne assez envie...