David Guetta: «Je ne suis pas un chanteur. Mon métier, c’est de créer le son»
MUSIQUE•«Listen», le sixième album de David Guetta, sort ce lundi. Rencontre avec le DJ français…Propos recueillis par Joel Metreau
Listen, le sixième album de David Guetta, sort ce lundi. A cette occasion, 20 Minutes a rencontré le DJ et compositeur français au succès international.
Pourquoi avoir mis trois ans à faire cet album?
C’était très dur. J’ai souffert pour le réaliser. Je voulais venir avec quelque chose de vraiment nouveau. Je ne suis pas un chanteur. Mon métier, c’est de créer le son. Si j’ai quelque chose de nouveau à dire quand je fais un nouvel album, c’est avant tout par la musique et le son. Il fallait que je trouve ce nouveau son, ce n’est pas facile. J’ai réussi à me réinventer trois fois dans ma carrière. Là, c’est la quatrième.
Quelles étaient les trois premières fois?
La première, ce serait la période Love is Gone–Chris Willis, qui s’inscrivait dans un truc house-électro, mais avec un chanteur de gospel. La deuxième, c’est quand j’ai commencé à mélanger musiques urbaines et musiques électroniques, ce qui était complètement inédit dans le monde. Ça a créé un mouvement musical mondial énorme: I Gotta Feeling, Sexy Bitch… La troisième, ça a été Titanium où je mélangeais indie pop et house music. Là, c’est une approche très différente. Après d’avoir fait des titres très club, je prends le contre-pied. C’est plutôt «organique dance musique». Je travaille avec des instruments acoustiques, un orchestre symphonique…
Ça a changé votre manière de travailler?
Oui, j'ai commencé par travailler sur les chansons en piano-voix ou guitare-voix, et puis, je les ai produits de manière électronique. Ça a influencé l’album, qui est beaucoup plus mélodique, avec des structures plus pop ou rock.
Pourquoi vous êtes-vous ouvert à la presse sur votre rupture avec Cathy?
C’est difficile de ne pas en parler, tellement l’album est lié à ça. C’est sûr que c’est un album davantage dans l’émotion et la mélancolie à cause de l’état de ma vie au moment où je l’ai fait.
S.I.A., Emeli Sandé, Nicki Minaj, Sam Martin... Il y a beaucoup de collaborations sur Listen. Pourquoi aucun artiste français?
Ce n’est pas que je ne veux pas travailler avec un artiste français, mais quand je sors un disque, c’est pour le monde entier, alors c’est difficile de mettre un morceau en français.
En 2012, vous avez eu la dent dure contre la critique française...
A l’époque j’ai complètement arrêté les interviews, j’avais été plus que vexé, ça m’avait fait mal. J’ai été manipulé par un magazine qui m’avait mis en couv et s’était servi de moi pour se valoriser et se donner une image branchée. C’était un magazine populaire et de qualité, tout comme moi je suis un artiste populaire et de qualité. J’avais passé trois jours à m’occuper d’eux et après ils m’ont défoncé. Ce n’était pas du tout éthique. Les gens ont le droit d’écrire des articles négatifs sur moi, mais à ce moment qu’ils ne me demandent pas de passer trois jours avec eux et de me confier sincèrement. Mais vous savez, je n’ai pas fait d’interview pour l’album précédent et j’ai vendu 4 millions d’albums dans le monde.
Vos parents ne vous ont pas encouragé dans votre carrière au départ...
Mais je ne leur en veux pas du tout. DJ, ce n’était même pas considéré comme un métier. Je me souviens d’une réunion avec ma prof de maths et mes parents, quand je leur ai dit ce que je voulais faire, ils m’ont regardé comme un extraterrestre. Et puis c’était un milieu pas rassurant pour des parents et a priori sans aucune perspective d’avenir. Entre-temps, ça a changé, et tous les ados veulent être DJ.
Vous vous rappelez du premier disque que vous avez acheté?
Ah oui bien sûr. C’était l’album Thriller de Michael Jackson. Quand j’ai compris comment synchroniser deux disques pour les enchaîner de manière fluide, c’était avec Billie Jean. A l’époque, je n’avais pas assez d’argent pour acheter deux platines, je m’entraînais en écoutant la radio et en mixant avec l’unique platine que j’avais.
Vous vous rappelez votre première télé en France? C'était La Classe sur FR3?
Ah non, c’est une interview de 1989, avec Laurent Garnier, à nos tout débuts. A l’époque, j’étais aux Bains Douches. On me voit avec quatre platines, une Roland TB-303, c’est avec ça qu’on faisait de l’acid house, avec un sampler et une boîte à rythmes, ce qui était révolutionnaire à l’époque. J’explique je suis un DJ de bedroom, que ce qui m’intéresse c’est la technique, et que la musique que je mixe n’est pas pop et que c’est loin de tout le côté business.