Don Rosa: «Picsou n’est ni bon, ni mauvais, il est humain»

Don Rosa: «Picsou n’est ni bon, ni mauvais, il est humain»

BANDE DESSINÉE – Après deux tomes consacrés à «la jeunesse de Picsou», le tome 3 que vient d’éditer Glénat compile les premières aventures dessinées par Don Rosa...
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

Il a fait de Picsou, personnage secondaire à l’origine, un héros de BD à part entière. Mais ne dites pas à Don Rosa que ses histoires sont devenues plus connues que celle de Carl Barks, le créateur du volatile, cela lui ferait de la peine. N’empêche! Glénat continue de publier l’intégrale des Picsou de Don Rosa. Le tome 3 sort pour les fêtes.

Glénat éditait déjà l’intégrale de Carl Barks et maintenant c’est votre tour.

Oh, ne me mettez pas sur le même plan que Carl Barks, pitié.

Vous n’aimez pas que l’on vous compare à Carl Barks?

C’est mon maître, il est indépassable.

Presque toutes vos histoires de Picsou ont pour point de départ une BD de Carl Barks, ou un détail que vous avez remarqué au détour d’une de ses cases…

Avant d’être un dessinateur, je suis un collectionneur et un fan obsédé. Voilà pourquoi chacune de mes BD est un acte d’allégeance à Carl Barks. J’adore dissimuler des détails dans mes dessins qui parlent aux seuls fans de canards, comme moi.

Mais dans la réédition de Glénat, vous racontez tout…

Oui, je me fais vieux et je voulais que tout ça se sache, c’est vrai.

Bien que respectueux de l’héritage de Carl Barks, vous vous êtes tout de même autorisé à inventer toute une jeunesse à son personnage…

C’est vrai, c’est paradoxal. Mais je donne ma vision personnelle. Je n’empêche personne de réécrire ces histoires. Tant qu’elle ne contredise pas Carl Barks. Et puis, je suis un faux modeste. Je sais que je suis l’un des plus grands connaisseurs de Picsou au monde. Je me sentais le droit d’écrire sur ce personnage.

Vous écrivez des histoires de canards mais vous mettez un point d’honneur à ce que tout soit plausible sur un plan historique et scientifique. Pourquoi ?

Picsou n’est pas un super-héros. J’ai toujours préféré les BD d’aventures avec des personnages hors du commun mais dont les exploits étaient possibles sur un plan humain. Le jeune Picsou est malin, fort et habile mais reste un canard comme les autres. Si je puis dire…

Le contexte des aventures, notamment les découvertes archéologiques, est aussi plus ou moins réaliste.

J’ai une approche très maniaque de l’écriture de scénarios. Je m’informe beaucoup avant d’écrire, je lis des livres d’histoire et d’archéologie. J’ai le fantasme du savoir absolu, c’est le syndrome du manuel des Castors Juniors. Une fois que j’ai ses informations, je préfère m’en servir, pour ne pas avoir l’impression d’avoir perdu mon temps.

Vous faites aussi rencontrer des personnages historiques à Picsou, comme Roosevelt…

Je trouve plus intéressant de faire évoluer Picsou dans une époque réelle, les années 1950. Donaldville est en Californie, Picsou a voyagé dans des pays qui existent vraiment. Il vit dans une réalité parallèle mais qui est une réalité quand même.

A part Picsou, qui est votre personnage préféré ?

Picsou.

Vos BD le rendent assez sympathique alors que c’est un vieil avare acariâtre et égoïste…

Picsou n’est ni bon, ni mauvais, il est un humain. Je voulais que les lecteurs ressentent sa complexité et c’est pour cela que j’ai raconté sa jeunesse, comment il a perdu ses parents, les efforts qu’il a dû faire en tant que jeune immigré, les aventures qui l’ont forgé.

Votre Picsou a parfois des états d’âmes, une mélancolie, l’impression de ne plus profiter de la vie à cause de son argent...

Picsou était un jeune homme simple qui aimait la nature, les animaux, les amis… Il est parfois nostalgique de sa vie passée. Mais au fond, je crois qu’il est fier du canard qu’il est devenu.