«C'est grâce à des séries comme» Fuzz et Pluck «que j'aime tant la bande dessinée », déclare Matt Groening, le créateur des « Simpson ». N'empêche qu'il a dû, comme nous, attendre plus d'une décennie pour qu'une suite soit donnée aux (més)aventures du duo créé par Ted Stearn.

Satire et délires

Compatissantes, les éditions Cornélius republient, à l'occasion du lancement de ce second volume, le premier tome initialement sorti en 2000.

Dans Fuzz et Pluck, on suivait les pérégrinations, en forme de road-movie, de l'improbable duo composé d'un ours en peluche et d'un poulet déplumé. Victime de la cruauté de son jeune propriétaire, le premier avait rencontré le second, évadé d'un abattoir, dans une benne à ordures. Un concept délirant, mais revendiqué par Ted Stearn : « Ça vient de mes influences littéraires, comme Don Quichotte, Gulliver ou Alice au pays des merveilles. Il y a dans ces récits la fabuleuse idée que tout peut arriver. Plus l'humour et à la satire, qui sont deux aspects indissociables de la condition humaine. » Après avoir sillonné un monde crasseux en quête d'un job, nos compères sont fortuitement séparés dans Splitsville : l'ourson Fuzz est embauché par un passeur de barge pour empêcher l'accès au pont concurrent, tandis que Pluck le poulet devient gladiateur dans une arène pour animaux…

Issu de l'animation (il a travaillé sur Beavis and Butt-Head, Futurama, Daria, etc), Stearn nourrit ses délires de cette expérience : « J'accorde plus d'importance aux expressions et aux postures des personnages, ainsi qu'au rythme et à la temporalité du récit. » De fait, son univers cartoon est graphiquement moins naïf qu'il n'y paraît. Et ses trames répétitives, régulièrement ponctuées de divagations psychédéliques, font de Ted Stearn l'un des plus inventifs représentants de la BD alternative made in USA.