CINEMA«We need to talk about Kevin»: Son fils, sa bataille

«We need to talk about Kevin»: Son fils, sa bataille

CINEMAL'actrice Tilda Swinton éblouit le spectateur en mère dépassée par un enfant diabolique...
Caroline Vié

Caroline Vié

Même les monstres ont des mamans. Dans We Need to Talk About Kevin, Lynne Ramsay balaye allégrement les notions d'instinct maternel et d'amour filial. En livrant une série de flash-back esthétiques et dérangeants, la réalisatrice de Ratcatcher (1999) et du Voyage de Morvern Callar (2003) signe une œuvre radicale sur la guerre larvée qui oppose une maman glaciale à Kevin, son fiston diabolique.

Glaçant et glacial

Bébé hurleur, enfant impossible puis ado retors, Kevin est un cauchemar sur pieds, d'autant plus effrayant qu'il n'est pas mû par une force démoniaque. Ezra Miller, révélation au regard glacial et au sourire glaçant, hante longtemps le spectateur, témoin impuissant d'un drame qu'il sait inéluctable.

«Il correspond à l'horreur que tout parent redoute d'avoir dans son salon en donnant naissance à un monstre», explique John C. Reilly, épatant en papa effacé et dépassé. Tilda Swinton, monolithe au regard de bête traquée, aurait mérité le prix d'interprétation au dernier Festival de Cannes. Rarement le désarroi et la culpabilité auront trouvé une incarnation plus juste que dans son personnage de mère incapable d'aimer son rejeton.

Dès l'ouverture du film, une demi-heure d'images et des sons agressifs aux frontières du cinéma expérimental, Lynne Ramsay plonge dans la tête de son héroïne coincée à la maison avec un bambin manipulateur, prêt à commettre le pire pour obtenir son attention à défaut de son affection.

We Need to Talk About Kevin pulvérise le rêve américain en malmenant la cellule familiale, mais son thème est universel. Point n'est besoin d'être parent ni né de l'autre côté de l'Atlantique pour comprendre la profonde solitude d'une femme confrontée à un modèle de mère parfaite auquel elle ne correspond pas. Sa détresse et sa dignité habitent ce film dont l'intense cruauté ne fait de cadeau ni à son public, ni à ses protagonistes. On ne ressort pas indemne de la salle de cinéma. Attention, film méchant!

La bande annonce

Roman

Lynne Ramsay s'est appuyée sur Il faut qu'on parle de Kevin, roman paru aux éditions Belfond. Lionel Shriver avait, quant à lui, choisi la forme d'un récit épistolaire où l'héroïne se confie à son époux pour expliquer son désespoir après que leur fils a commis un acte atroce. Sa confession drôle et cruelle dérange aussi profondément que le long métrage.