Bienvenue dans l'enfer du Nord

Bienvenue dans l'enfer du Nord

Le calvaire de migrants clandestins est décrit avec minutie, sensibilité et réalisme dans une histoire d'amitié pudique. Welcome, le nouveau film de Philippe Lioret, raconte comment un maître-nageur de Calais se prend d'affection pour un jeune réfugi...
Caroline Vié

Caroline Vié

Le calvaire de migrants clandestins est décrit avec minutie, sensibilité et réalisme dans une histoire d'amitié pudique. Welcome, le nouveau film de Philippe Lioret, raconte comment un maître-nageur de Calais se prend d'affection pour un jeune réfugié kurde, bien résolu à traverser la Manche à la nage pour retrouver sa fiancée au Royaume-Uni. Vincent Lindon, parfait en brave type égoïste des plus ordinaires, passera de l'indifférence à une mobilisation acharnée pour aider son compagnon d'infortune.

Dans le rôle du gamin à peine sorti de l'enfance, Firat Ayverdi, comédien non professionnel déniché en France après des mois de recherches, se révèle éblouissant de naturel. Sa prestation surprend par sa justesse, tant au cours de séances d'entraînement dans le grand bassin que lorsqu'il tente de joindre sa petite amie, en passe d'être mariée de force. Le réalisateur de Je vais bien, ne t'en fais pas appréhende le quotidien d'êtres déchirés entre la misère et la peur, dressant un tableau assez sinistre de la France d'aujourd'hui. Délation entre voisins et patrouilles de police menaçantes sont heureusement contrebalancées par les réactions de citoyens refusant l'arbitraire. « J'ai fait ce film parce que je veux encore croire aux sentiments et à l'intelligence plutôt qu'au cynisme et à l'intérêt », précise Philippe Lioret. A la vision de cette oeuvre sobre et forte, on pense à un certain cinéma britannique, celui de Ken Loach et de Mike Leigh, où l'humain fait bon ménage avec le social. Welcome est plus qu'un film réussi : il s'agit d'un appel à la solidarité dont l'écho résonne longuement une fois les lumières rallumées. ■