«Visite ou mémoires et confessions»: Manoel de Oliveira livre ses secrets dans un opus posthume
SOUVENIR•Son coscénariste et ami Jacques Parsi partage avec «20 Minutes» quelques secrets du maître portugais décédé en 2015 pour la sortie d'un film resté plus de trente ans inédit...Caroline Vié
Dans Visite ou mémoires et confessions, on retrouve un Manoel de Oliveiraseptagénaire, donc relativement jeune quand on sait qu’il s’est éteint en 2015 à l’âge de 106 ans. Il a réalisé ce film en 1981, en demandant qu’il ne soit projeté qu’après sa mort, par pudeur. Le cinéaste portugais y parle de sa vie et du cinéma en montrant la maison familiale dont il a dû se séparer. Cette œuvre posthume parfois drôle, souvent bouleversante, donne envie de revoir les autres films du maître. A l’occasion de cette sortie, son ami et collaborateur Jacques Parsi évoque pour 20 Minutes des aspects méconnus de la carrière du cinéaste.
La France a reconnu Manoel de Oliveira la première
Au milieu des années 1970, le réalisateur était mal vu dans son pays. Il avait notamment réalisé Amour de perdition (1979), film fleuve de quatre heures trente, fort mal reçu à la télévision où il avait été diffusé en feuilleton.
« Après la Révolution des œillets, les gens attendaient de lui un grand film contestataire, explique Jacques Parsi, et il a pris une volée de bois vert en adaptant ce classique de la littérature portugaise. Il lui a fallu attendre que le film soit diffusé à Paris par les Cahiers du cinéma pour que les snobs de son pays commencent à se dire qu’ils avaient raté le coche, mais sa reconnaissance a tout de même été assez longue à venir au Portugal. »
Manoel de Oliveira était un séducteur
Sportif dans sa jeunesse, ancien champion automobile, Manoel de Oliveira épouse, en 1940, Maria Isabel (1918-2015), le grand amour de sa vie à laquelle il rend hommage dans Visite, mémoires et confessions où elle est interviewée. Elle était de dix ans sa cadette et ne lui a pas survécu.
« Manoel tombait facilement amoureux, notamment de ses actrices. Il aimait séduire et sa femme le surveillait comme le lait sur le feu. Même dans leur grand âge, elle ne supportait pas de le voir s’approcher des jeunes stagiaires. Malgré son fort caractère, elle accepte de dire ce qu’il attend d’elle quand il lui donne la parole dans le film. »
Manoel de Oliveira prenait soin de sa santé
Il a passé la fin de sa vie à faire des films, au moins un par an. Pour ce faire, le réalisateur menait une vie saine et faisait notamment très attention à ne pas se lever trop brusquement, de façon à ne pas se blesser.
« Il était aussi incroyablement prudent, se souvient Jacques Parsi. Il aimait que la fenêtre reste ouverte, par exemple, quitte à se couvrir d’une parka en plein hiver afin de pouvoir respirer l’air de la mer. Rien ne le vexait davantage que l’on veuille l’aider ou lui porter sa valise. Et il craignait par-dessus tout de finir diminué. Mais il travaillait tout le temps, et c’est ce qui l’a certainement maintenu en vie si longtemps. »