Remords et skate-board
CRITIQUE – Les séances de glisse du film de Gus van Sant prennent...Caroline Vié, à Cannes
Tout commence par l’interrogatoire d’un adolescent par un policier affable. Dès le début de «Paranoid Park», le spectateur comprend que le héros du film n’est pas étranger à la mort d’un agent de sécurité, retrouvé coupé en deux par un train sur une voie ferrée. L’art du réalisateur consiste à faire découvrir progressivement ce qui s’est passé et comment le jeune homme va assumer (ou non) ses responsabilités.
Ce casse-tête ludique et brillant donne un polar centré sur les skate-boardeurs de Seattle. Les séances de glisse prennent des allures de rêve éveillé tandis que le garçon se laisse de plus en plus happer par la culpabilité.
La lumière du grand chef-opérateur Christopher Doyle, qui fut longtemps le collaborateur de Wong Kar-wai, apporte une touche de magie supplémentaire à ce conte qui passe élégamment du rêve au cauchemar. Le réalisateur saisit brillamment le passage entre l’enfance et l’âge adulte, le moment où un cas de conscience fait basculer son héros dans le monde des grandes personnes. La justesse de son propos remporte l’adhésion. Les rapports du garçon avec sa petite amie ou sa relation avec ses parents qui, pour la première fois, ne peuvent le tirer d’affaire sont montrés sobrement. C’est ce qui fait la force de ce film dans lequel un instant suffit à faire basculer deux vies dans la tragédie.