François Ozon joue avec les genres pour «Une nouvelle amie»
CINEMA•Le réalisateur signe un film original et brillant autour de la notion de genre...Caroline Vié
Une nouvelle amie fait partie de ces films qui posent un vrai souci au journaliste. Comment en dire suffisamment pour donner envie au spectateur de courir voir le nouveau film de François Ozon sans dévoiler le secret de cette histoire de deuil librement inspirée d'une nouvelle de Ruth Rendell? On ne saurait trop recommander d'essayer d'échapper aux spoilers et de foncer découvrir ce que le réalisateur de Jeune et jolie (2013) définit comme un «conte de fées».
Une performance ludique
A la mort d'une jeune femme (désincarnée par une Isild Le Besco diaphane), son veuf et sa meilleure copine tentent de lutter contre leur chagrin en se rapprochant l'un de l'autre. Leur façon de résister à une peine épouvantable balaye les idées reçues et autres conventions pour déboucher sur une histoire étonnamment sensuelle dans laquelle Romain Duris trouve l'un de ses plus beaux rôles en papa inconsolable qui doit élever seul le bébé que lui a laissé son épouse. «J'ai tout de suite aimé son rapport au personnage, dit François Ozon. Il y avait quelque chose de ludique chez lui car il voyait ce rôle comme une continuité de son travail d'acteur».
Un duo de comédiens époustouflants
Le comédien a travaillé en étroite collaboration avec François Ozon allant jusqu'à l'aider à dénicher sa partenaire, Anaïs Demoustier éblouissante en camarade de jeu cédant petit à petit à ses pulsions. «Dès la première audition, l'alchimie entre Romain et Anaïs a été remarquable, explique le réalisateur. Ils se complétaient parfaitement en jouant de leurs côtés masculin et féminin jusqu'à gommer les frontières entre les genres». Une scène d'amour particulièrement érotique constitue le point d'orgue de cette œuvre virtuose qu'on verrait bien figurer aux César pour ses deux comédiens. «Ils ont compris leurs personnages avec une sensibilité incroyable leur permettant d'éviter toute caricature», dit François Ozon.
Dédramatiser les choses
Le cinéaste a écrit son scénario en plein cœur des manifestions anti mariage pour tous. «Je ne voulais pas être agressif mais dédramatiser tout cela en montrant que le bonheur familial peut prendre plusieurs visages», dit-il. Son film original et culotté en témoigne avec générosité, humour et un sens de l'émotion savamment dosé. Cette meilleure amie devient rapidement celle d'un spectateur conquis par son naturel et son humanité.