Willy Sagnol vit sa première déferlante médiatique. Le coach girondin est dans l’œil du cyclone du football français depuis ce mardi matin. Invité d’un chat dans les locaux de Sud Ouest, lundi après-midi, l’entraîneur girondin a répondu librement à de nombreuses questions mais a fait preuve de maladresse au sujet des joueurs africains.

«L’avantage du joueur typique africain, c’est un joueur pas cher quand on le prend, prêt au combat généralement, qu’on peut qualifier de puissant sur un terrain, a décrit Sagnol. Mais le foot ce n’est pas que ça. C’est aussi de la technique, de l’intelligence, de la discipline. Il faut de tout. Des nordiques aussi, c’est bien les nordiques, ils ont une bonne mentalité. C’est un mélange, une équipe de foot, c’est comme la vie, c’est comme la France, c’est un mélange. On a des défenseurs, des attaquants, des milieux, des rapides, des grands, des petits, des techniques.»

Lilian Thuram «extrêmement surpris»

Cette déclaration a soulevé un tollé médiatique tout au long de la journée, comme en témoigne cette réaction de l’ancien coéquipier de Sagnol en équipe de France, Lilian Thuram. «Lorsque vous lisez ou que vous écoutez Willy Sagnol, on constate qu'il renforce ces préjugés-là [enfermer les joueurs africains dans leur force en niant une certaine intelligence], a-t-il regretté dans Europe 1 Soir. Ça me surprend parce qu'il n'avait jamais tenu de tels propos. C'est vrai que, malheureusement, nous vivons dans un pays où subsistent des préjugés. Lui, les renforce. Je suis extrêmement surpris qu'il puisse tenir ce genre de propos. Car, que ce soit en équipe nationale ou en club, il a dû jouer avec des joueurs africains ou d'origine africaine et a dû constater qu'il y avait des joueurs intelligents, disciplinés et très bons tactiquement.»

Interrogé par RMC dans la soirée, le sélectionneur du Congo Claude Le Roy a également fustigé son confrère. «Peut-être qu’il a eu comme conseiller Patrick Buisson ou Jean-Marie Le Pen, ou il a lu le discours de Dakar (prononcé par Nicolas Sarkozy en 2007). C’est terrible, s’est exclamé l’ancien sélectionneur du Cameroun. D’autant plus qu’il démarre en carrière et que jusqu’à preuve du contraire, il n’a absolument rien gagné, rien prouvé et rien fait. J’espère que ceux qui sont en charge de l’éthique dans le football, dont on parle souvent, vont réagir et l’amener à corriger ses propos.»

«L'affaire Sagnol» a aussi eu un certain écho du côté des politiques. «J'ose espérer que ces propos -considérer que la couleur de peau est un élément qui caractérise la qualité d'un joueur- relèvent plus de la maladresse que le fond de sa pensée, a exprimé Naïma Charaï, conseillère régionale d’Aquitaine. Ces malencontreux propos voulaient, je l'espère, illustrer que le recrutement de jeunes joueurs originaires d'Afrique doit être totalement repensé et non plus basé que sur le "critère de puissance physique".»

Les Girondins s’indignent et défendent leur entraîneur

Devant l’ampleur prise par les déclarations de son entraîneur, les Girondins ont publié un communiqué officiel dans la soirée. «Le club prend connaissance avec stupeur et indignation de la polémique née de propos tenus par Willy Sagnol. L’interprétation de l’interview accordée à Sud Ouest semble plus tenir de réactions épidermiques et malveillantes que d’une analyse objective des mots prononcés par Willy Sagnol. Devant cette polémique, Willy Sagnol éprouve un sentiment d’incrédulité et de colère face à l’interprétation erronée et raccourcie de ses propos. Le club dénonce tous ceux qui souhaitent exploiter à des fins malveillantes cette polémique et apporte tout son soutien à Willy Sagnol.»

Un soutien qui n'a pas manqué d'interpeller la Licra (Ligue Internationale Contre le Racisme et l'Antisémitisme) Bordeaux et Gironde qui, par un communiqué, a annoncé «mettre un terme unilatéralement au partenariat qui la lie aux Girondins et étudier la possibilité d'une plainte pénale contre Willy Sagnol.»