Coupe de France: Furlan, un des derniers apôtres français du beau jeu
•FOOTBALL – L’entraîneur de Troyes, qui reçoit Bordeaux en demi-finale ce mardi soir, mise avant tout sur le beau jeu, peu importe le contexte et l’équipe qu’il dirige…Marc Nouaux
Jean-Marc Furlan est un personnage atypique dans le football français. Un des seuls techniciens de l’hexagone à s’appuyer sur des petits gabarits et à prôner le jeu avant tout. Peu importe le club, peu importe les résultats. Né à Sainte-Foy-la-Grande, en Gironde, le coach de Troyes va affronter Bordeaux, son club de cœur, mardi soir en Coupe de France pour une place en finale. Et là encore, pas question de bafouer ses principes de jeu. Si qualification il doit y avoir, elle se fera grâce à des mouvements collectifs plutôt que par des longs ballons aériens balancés dans le dos de la défense girondine. «Il a une philosophie de jeu et il en a très peu dérogé depuis qu’il exerce, décrit son ancien adjoint à Libourne, aujourd’hui coach du Stade Bordelais en CFA, Laurent Dauriac. Il a une culture très précise. Moi, c’est mon mentor, il n’y a pas à tergiverser.»
Revenu à Troyes en 2010 avec pour objectif de donner une véritable identité de jeu à un club qui n’a pas de gros moyens, Furlan applique sans relâche ses principes. Les mêmes depuis qu’il a débuté sa carrière d’entraîneur à Libourne, en CFA 2. «Lorsque je vois jouer Troyes, ça me rappelle quand on jouait avec Libourne, reconnaît Matthieu Ligoule, qui a connu les épopées en Coupe de France au début des années 2000 à Libourne avec le coach de l’ESTAC. C’est basé sur le mouvement, la répétition des passes, ça ne change jamais. On avait, nous aussi, des petits gabarits, on faisait des redoublements de passes. C’était plaisant à jouer pour nous et même pour les spectateurs. Je me suis vraiment régalé pendant ces années.»
Un coach humain, calme et minutieux
Mordu de vidéo, « déjà à Libourne, on en faisait beaucoup», se souvient Ligoule, Furlan ne laisse rien au hasard dans la préparation de ses rencontres, quitte à abreuver ses joueurs d’informations. «Il a toujours bien su préparer l’exploit avec un discours qui nous permettait d’avoir confiance en nous», rajoute Ligoule. Les jeunes, qui ont eu la chance de participer à des entraînements avec l’équipe première de Libourne Saint-Seurin, gardent le souvenir d’un entraîneur «vraiment gentil qui prenait le temps de demander comment ça allait et qui était proche de tous les joueurs».
Le contenu de ses séances d’entraînement ? Sans surprise, du jeu et peu de physique. «De la passe à dix, beaucoup d’attaque-défense», énumère Ligoule. Une méthode qu’il a mise en place à Strasbourg, Nantes et à Troyes, même sous la pression des résultats (Il a connu deux descentes en Ligue 2). «Ce n’est pas dit qu’il ferait mieux en choisissant de jouer défensivement vu les joueurs qu’il a, défend Laurent Dauriac. A partir du moment où on donne du plaisir au public et aux spectateurs, autant continuer dans cette logique.»
«Furlan, il a fait des finales ?»
Auteur de beaux parcours en Coupe de France avec Libourne, alors en CFA, notamment en 2002 avec une qualification en quart de finale, Furlan n’a pourtant jamais remporté cette compétition qui lui tient à cœur. Atteindre la finale pourrait d’ailleurs lui donner un rayonnement plus important afin d’être mieux reconnu médiatiquement. «Il n’a pas besoin de ça, répond Dauriac, qui devrait aller l’encourager au stade de l’Aube, mardi. Déjà pour nous, dans le milieu, c’est quelqu’un de reconnu. Tous ceux qui le connaissent savent qu’il fait un boulot extraordinaire par rapport aux petits moyens qu’il a.»
Si son ancien adjoint n’est pas avare en compliment, son homologue girondin, Francis Gillot, s’est montré plus sec quand une question lui a été posée au sujet du coach troyen et des bons coups qu’il a pu réussir en Coupe. «Furlan, il a fait des finales ? Non ? Ben donc, déjà, pour moi, un spécialiste de la Coupe, c’est quelqu’un qui l’a gagnée trois ou quatre fois… Après, c’est l’équipe qui va gagner, ce n’est pas lui.» La réponse du Nordiste prouve bien que tant que l’on a rien gagné, on n’est finalement que peu de chose dans le sport de haut niveau. On imagine que Furlan se fera une joie de prouver que lui et son équipe ne se sont pas retrouvés dans le dernier carré de la Coupe de France par hasard. Histoire de pouvoir dire à son tour, «j’ai gagné quelque chose». Et si en plus, il pouvait y arriver en pratiquant un beau football, le public s’en souviendra encore davantage.