Le romancier utilisait des pseudos sur Amazon pour encenser ses livres
POLEMIQUE•Roger Jon Ellory descendait également les romans de ses confrères sur le site marchand pour faire vendre les siens...Anaëlle Grondin
«Un chef-d’œuvre des temps modernes», «certains paragraphes donnent le frisson», «c’est le livre le plus émouvant que j’aie jamais lu», «l’un des plus talentueux auteurs d’aujourd’hui» … C’est en ces termes que l’utilisateur «Nicodemus Jones», invitait sur Amazon les autres internautes à acheter et lire le livre «Seul le silence» de l’écrivain britannique de polars RJ Ellory, auquel il donnait systématiquement cinq étoiles. Ce même Nicodemus Jones n’hésitait pas par ailleurs à dire tout le mal qu’il pensait des oeuvres de Stuart McBride ou à critiquer Mark Billingham, un autre romancier. Sauf que derrière cet étrange pseudonyme se cachait en réalité… l’auteur RJ Ellory lui-même. Le romancier souhaitait inciter les internautes à acheter ses romans plutôt que ceux de ses confrères. L’auteur, qui a déjà reçu plusieurs récompenses pour son travail par le passé, avait d’autres pseudonymes, comme Jelly Bean. L’imposture durait depuis dix ans, selon le Telegraph.
Le pot aux roses a été découvert par l’auteur de romans d’espionnage britannique Jeremy Duns, qui a dévoilé l’affaire en fin de semaine dernière sur le site de micro-blogging Twitter, plusieurs preuves à l’appui. Dimanche soir, RJ Ellory a été obligé de reconnaître qu’il avait eu recours à plusieurs fausses identités sur Amazon pour encenser ses ouvrages. Dans un communiqué, il a reconnu être l’auteur «des commentaires positifs et négatifs» qui lui sont imputés avant de présenter ses excuses à ses lecteurs et à la communauté littéraire. Le voilà désormais montré du doigt par toute la presse britannique et américaine, et par ses confrères.
Les fausses critiques, une pratique «si tentante et facile»
Son attitude a été condamnée par un groupe de 49 auteurs britanniques dans une lettre ouverte au Telegraph, et la «Crime Writer's Association», qui compte parmi ses 600 membres les auteurs de polars anglais les plus influents, s’est dit indignée. S’il attire toute l’attention sur lui aujourd’hui, RJ Ellory serait loin d’être le seul à publier de fausses critiques sur les sites marchands. Jeremy Duns affirme que «c’est même permanent», avant d’ajouter: «C’est si tentant, si facile… et très difficile à prouver». Il y a deux ans, l’historien britannique Orlando Figes avait confessé avoir publié des critiques similaires faisant l’éloge de ses propres ouvrages sur Amazon.
Le débat sur le crédit à accorder aux critiques anonymes publiées en ligne est relancé. Et il ne concerne pas que le monde littéraire. Que penser des sites de voyages, sur lesquels certains hôtels ou restaurants sont mis en avant, par exemple? Comment savoir si les avis sont biaisés?
>> Et vous, vous basez-vous sur les critiques des internautes avant d’acheter un produit sur un site marchand ou vous méfiez-vous de ce qui peut être dit? Dites-le nous dans les commentaires ci-dessous.