CULTURE«Fifty Shades of Grey»: La saga érotique que s'arrachent les Américaines

«Fifty Shades of Grey»: La saga érotique que s'arrachent les Américaines

CULTUREUne adaptation érotique de la saga «Twilight» cartonne dans les libraires outre-Atlantique. Considérée comme du «mummy porn», du porno pour les ménagères de moins de 50 ans, la trilogie sera traduite en français à l'automne...
Les deux premiers tomes de la saga érotique à succès de E.L. James. 
Les deux premiers tomes de la saga érotique à succès de E.L. James.  - AP/SIPA
Annabelle Laurent

Annabelle Laurent

Le pitch? Anastasia Steele, étudiante vierge de 22 ans, succombe aux pratiques sexuelles sadomasochistes de Christian Grey, un milliardaire de 27 ans. Le rapport avec Twilight? Pas grand-chose en termes d’histoire, on vous l’accorde. C’est pourtant bien de la saga vampirique que s’est inspirée E.L James, l’auteure de Fifty Shades of Grey.

Grande admiratrice de Stephenie Meyer, cette productrice de télévision anglaise a d’abord commencé sa «fan-fiction» sous la forme d’un blog. La version grivoise désarçonne ceux qui ne jurent que par Bella et Edward, mais l’enthousiasme est assez grand pour que le blog se transforme rapidement en e-book… puis en livre, grâce au coup de pouce d’un éditeur australien qui publie en mai 2011 le premier tome. Le bouche-à-oreille et le succès grandissant encouragent E.L James à en écrire un second en septembre 2011, puis un troisième en janvier 2012… Et c’est finalement ce même mois que la maison d’édition américaine Vintage Books signe à E.L James un chèque à six chiffres et l’importe aux Etats-Unis.

Dix millions de livres

Bilan de cette success-story: dix millions d’exemplaires écoulés ces six dernières semaines, e-books et livres physiques confondus. Jamais une série littéraire ne s’était vendue aussi rapidement. Les trois tomes occupent le trio de tête du classement des meilleures ventes du New York Times depuis dix semaines. Universal Pictures va l’adapter au cinéma, 37 pays ont acquis les droits de traduction… L’auteure, qui s’avoue dépassée par un tel succès, parcourt les Etats-Unis de long en large pour faire la promotion du bouquin dans les villes américaines.

Du «mummy porn» qui se lit discrètement sur e-book

Comment interpréter un tel phénomène? Les journaux américains, à commencer par le New York Times relaient l'expression de «mummy porn». Du porno pour les ménagères de moins de 50 ans, qui non seulement se l’arrachent mais en parlent ouvertement, bravant l’habituel non-dit concernant les lectures du genre. D’autant que la saga ferait un bien fou à ses lectrices «Il ravive la flamme au sein de nombreux couples mariés» prétend même la fondatrice du site pour jeunes mamans DivaMoms.com, interrogée par le quotidien.

Autre approche du phénomène: Fifty Shades of Grey devrait son carton à l’e-book, facile à acquérir incognito sur Internet plutôt que d’avoir à rôder dans sa librairie de quartier en transpirant à l’idée d’y croiser un voisin. L’e-book pouvant aussi se lire paisiblement dans le métro en adoptant l’air inspiré de la lectrice plongée dans Proust.

Porno aux Etats-Unis, érotique gentillet en France?

Fifty Shades of Grey n’échappe quand même pas à la censure. Le roman a été écarté des bibliothèques de Floride, du Wisconsin et de Georgie. Motif: trop pornographique. D’autres bibliothèques auraient pris la même décision.

Typique du puritanisme américain, tranche Isabelle Laffont, la directrice des éditions JC Lattès à l’origine de la traduction française prévue pour l’automne. «Mummy Porn? C’est surtout une histoire d’amour, un conte de fées moderne pimenté d’érotisme. Pour nous européens, c’est de l’érotisme gentillet» estime l’éditrice, qui est aussi celle de Stephenie Meyer (Les âmes vagabondes).

Le lectorat français sera-t-il au rendez-vous à l’automne? Isabelle Laffont table sur un succès auprès d’un public bien plus large que les amateurs des livres érotiques, «qui vont trouver ça soft». «Ce n’est pas un bouquin sulfureux ni vulgaire, c’est plutôt traditionnel, et il y a une morale d’ailleurs!» juge la directrice des éditions JC Lattès. «Et puis l’héroïne n’arrête pas de prendre son pied, ce qui est assez sympathique!» conclut-elle enthousiaste.