TENNISPaul-Henri Mathieu: «J'entame une deuxième carrière»

Paul-Henri Mathieu: «J'entame une deuxième carrière»

TENNISLe Français, opéré du genou gauche, est de retour sur les courts à l'entraînement...
Propos recueillis par Romain Scotto

Propos recueillis par Romain Scotto

A sa démarche, rien n’indique que son genou gauche couine encore un peu. Paul-Henri Mathieu se remet pourtant d’une ostéotomie tibiale, après un début d’arthrose, et revient progressivement au haut niveau. A raison d’une heure par jour, l’ancien 12e joueur mondial s’entraîne à Roland-Garros, en espérant rejouer au plus vite en tournoi. Onze mois après son dernier match sur le circuit ATP, à Bâle.

Comment allez-vous, et quand peut-on espérer vous revoir sur les courts?

Mieux qu’il y a quelques mois… J’ai toujours quelques douleurs, normales après l’opération. Il faut se réhabituer. Les douleurs diminueront petit à petit. Au repos, je ne sens rien. J’ai le genou qui ne gonfle pas. Je n’ai aucune idée de la date de mon retour. La saison prochaine, je l’espère. Mais on ne m’a rien dit. Il y a des semaines où ça va. D’autres moins. Je ne me suis pas fixé d’objectif de retour. Les interclubs 2011, avec le TC Paris, ça va être un petit peu tôt. Si je peux en jouer, je le ferai.

Votre dernier match en tournoi remonte à un an, c’était en novembre 2010. Cela vous manque?

Oui, ça me manque. Les tournois, plus que les entraînements. J’aimerais me préparer avant les matchs, les jouer. Forcément, j’ai fait ça pendant plus de quinze ans. C’est quelque chose qu’on n’oublie pas et qu’on aimerait revivre. Je regarde des matchs à la télé pour l’instant. Je suis les résultats, même sur les challengers.

Dans quel état d’esprit est le PHM qui revient sur les courts? Plus mature?

Plus mature non, je l’étais déjà. Je reviens de loin, forcément. C’est une deuxième carrière qui va commencer. La première est complètement derrière moi. Après une telle coupure, je sais que je reviens de loin. J’aborde les choses différemment. Je serais content d’être sur le court sans douleur, sans me fixer d’objectif. Ça n’a rien à voir avec mes précédentes blessures. Je ne le souhaite à personne. On ne peut pas connaître pire. Plus d’un an d’arrêt, sans savoir quand je vais rejouer… C’est assez rarissime.

Pendant cette période de convalescence, avez-vous pensé à arrêter?

Oui, bien sûr. C’est humain. On se pose la question avant l’opération, après aussi. Est-ce qu’on a la force de recommencer à zéro, surpasser la douleur… Je pouvais arrêter le tennis du jour au lendemain.

A quoi vous êtes-vous raccroché pour revenir?

Je ne sais pas trop, parfois je me le demande. J’ai été immobilisé six semaines. Je ne faisais pas grand-chose. Mais dès qu’on m’a enlevé l’attèle, je me suis entretenu du haut du corps. Puis j’ai attaqué la rééducation. Finalement ça a occupé toutes mes journées depuis six mois. J’ai aussi tapé quelques balles pour garder le contact.

Qu’avez-vous appris pendant cette période sur le monde du tennis?

Quand on est éloigné des courts comme ça, on a plus de recul. Sur le circuit, on est enfermés dans notre bulle sans voir ce qu’il se passe à l’extérieur. Là, je m’en rends compte. Sans être critique, c’est la loi du sport qui veut ça. Ce sont des choses perso. On est enfermés sur nous-mêmes, pas très ouverts avec nos structures. Tout le monde est comme ça. J’en suis conscient, j’étais le premier comme ça. On veut se protéger. Mais je pense qu’on devrait plus s’ouvrir.

Vous ne vous êtes pas senti soutenu par le monde du tennis?

Soutenu c’est un grand mot. Oui et non. C’est la loi de la vie, quand tout nous réussi, il y plus de monde autour de nous et dans les périodes difficiles, il y a moins de monde. Mais bon, ça fait plaisir d’avoir des messages de personnes auxquelles on n’aurait pas pensé. J’ai créé des liens d’amitié avec d’autres aussi.

Vous êtes aujourd’hui 393e mondial. Vous avez le vertige en y pensant?

Le classement, c’est vraiment secondaire. De toute façon je vais finir 0 (non classé…) Mon dernier tournoi c’était à Bâle (en novembre 2010) et je ne vais pas rejouer avant. Donc je serai hors classement. J’aurai un classement protégé d’environ 90e qui me permettra d’entrer dans quelques tournois. Ensuite, je vais demander des invitations à droite à gauche. Je pense que j’arriverai à remonter à un niveau honorable.

Après une si longue période d’inactivité, le corps peut-il repartir au combat aussi facilement que la tête?

Je connais la difficulté des blessures. Je sais que je peux revenir. Je ne suis pas maudit. J’ai un peu moins de chance que certains. Il ne faut pas nier le fait que je suis plus fragile. Depuis le plus jeune âge, j’ai fait tout ce qu’il fallait pour éviter les blessures. Je me suis fait opérer du genou à 17 ans. Je n’ai jamais eu mal et ça ressurgit douze ans après. Quand on commence le sport de haut niveau, ça fait partie du métier. Aujourd’hui, on dit de faire du sport pour rester en bonne santé. Mais à haut niveau, c’est l’inverse. C’est un sport d’usure. Surtout le tennis. Il faut beaucoup s’entraîner. On est usés.