JUSTICELiliane Bettencourt: Un casse-tête pour sa mise sous protection

Liliane Bettencourt: Un casse-tête pour sa mise sous protection

JUSTICEL'héritière de L'Oréal souffre à 88 ans d'une maladie cérébrale...
© 2011 AFP

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S'assurer de la bonne protection de la troisième fortune de France, Liliane Bettencourt, souffrant à 88 ans d'une maladie cérébrale et en conflit ouvert avec sa fille unique: voilà la gageure confiée à la juge des tutelles de Courbevoie, Stéphanie Kas-Danno.

Lundi, la jeune magistrate en appelle à la Cour de cassation pour lui demander si elle est fondée à poursuivre son enquête sur la nécessité de mesures judiciaires pour protéger la milliardaire, alors que sa fille Françoise s'est désistée de la procédure qu'elle avait pourtant engagée à trois reprises.

Dans ses dossiers, trois procédures distinctes: les demandes de mise sous tutelle demandées par Françoise, la mise en oeuvre du mandat de protection accordé à l'avocat de la fille du fondateur de L'Oréal en janvier et une requête en juin l'alertant sur la gestion de ce protecteur, soupçonné d'être un «prédateur» par la fille.

Maladie cérébrale

«La juge dispose à ce jour de toutes ses prérogatives de magistrat, elle peut à la fois suspendre ou révoquer le mandat de protection voire même décider une tutelle ou curatelle pour protéger les intérêts» de l'octogénaire, explique Anne Caron-Déglise, conseillère à la cour d'appel de Paris.

Au coeur de ces trois procédures, l'état de santé de Liliane Bettencourt. Pour le gériatre-expert qui a pu l'examiner mi-décembre, elle souffre d'«une importante diminution de l'audition» et ses «facultés cognitives sont nettement altérées par une maladie cérébrale d'origine mixte».

Le médecin conclut que l'octogénaire a besoin d'être épaulée. Le 20 janvier, l'avocat de Liliane Bettencourt, Me Pascal Wilhelm, devient à sa demande et avec l'accord de sa fille, son protecteur, chargé de gérer ses biens.

Décision éventuelle de mesures judiciaires de protection

Dans le même temps, la procédure de mise sous tutelle court toujours. La juge d'instance ne sachant pas si le désistement de Françoise Bettencourt-Meyers enterre la procédure, trois médecins finalisent leur rapport, s'appuyant sur le dossier médical de l'octogénaire mis à disposition de la justice.

Les trois experts constatent une «altération conjointe des facultés mentales et physiques» et recommandent un placement sous curatelle renforcée, un dispositif à mi-chemin entre le mandat de protection et la tutelle.

Deux semaines plus tard, le 7 juin, rompant l'accord de non-agression scellé avec sa mère, Françoise dépose une requête à la juge des tutelles de Courbevoie, lui demandant de vérifier la bonne exécution du mandat confié à Me Wilhelm, accusé d'«instrumentaliser» la milliardaire «en situation de vulnérabilité».

Après cette requête, l'avis de la Cour de cassation n'aura donc que peu d'effet sur le devenir d'une décision éventuelle de mesures judiciaires de protection puisque la juge a été une nouvelle fois saisie par un autre biais.

Possibilité de mesure de sauvegarde provisoire

Le temps presse: la juge dispose d'éléments corroborant une fragilité de Mme Bettencourt, questionnant la lucidité de sa décision d'être protégée par son avocat, ainsi que du signalement de mauvaise gestion de la fille de Mme Bettencourt.

Si la Cour de cassation estime que la procédure de tutelle peut se poursuivre, la juge devra rendre sa décision d'ici le mois d'octobre, soit un an après le début des démarches.

Si la Cour de cassation conclut à l'extinction de la procédure de mise sous tutelle, la juge pourra continuer d'instruire la requête sur les conditions d'exécution du mandat de protection actuel, mais n'aura que quelques semaines pour prendre une décision. Elle pourra alors soit prendre une mesure de sauvegarde provisoire, soit trancher au fond la question de la protection de Mme Bettencourt.

La Cour de cassation devrait rendre son avis sous huit jours.