Libye: Le conseil national de transition, «le visage politique de la révolution»
DÉCRYPTAGE•lors que le soulèvement contre le régime de Mouammar Kadhafi dure depuis près d’un mois, l'opposition s'organise politiquement. 20minutes.fr vous explique ce qu'est le Conseil national de transition libyen...Bérénice Dubuc
C’est quoi?
Le Conseil national de transition libyen (CNL) est l’instance politique de l'insurrection contre le colonel Kadhafi. Il a été créé le 5 mars à Benghazi, par les représentants de l'insurrection qui s'oppose aux forces du «guide suprême» libyen. A l'issue de sa première réunion, le CNL s'est déclaré dans un communiqué «le seul représentant de la Libye», et a souligné qu'il n’est nullement un gouvernement provisoire. Il a également précisé que toutes les délégations diplomatiques à l'étranger ralliées à la révolte étaient considérées comme ses «représentants légitimes». Il siège «temporairement» à Benghazi, «jusqu'à la libération de la capitale Tripoli, son siège permanent».
Quels sont ses objectifs?
Le CNL est, pour ses fondateurs, «le visage politique de la révolution». Il a pour objectif de coordonner les différentes villes tombées aux mains des insurgés, et se veut un organe d'intérim pour l'après Kadhafi. Selon son site Internet, «le conseil, tire sa légitimité des décisions des conseils locaux mis en place par la coalition du 17-Février. L'objectif du Conseil national de transition est d'orienter la Libye au cours de la période intérimaire qui viendra après sa libération complète et la destruction du régime oppressif de Kadhafi. Elle guidera le pays à des élections libres et la création d'une constitution pour la Libye.»
Cependant, aucun véritable gouvernement d'intérim ne sera formé avant que Tripoli ne soit sous le contrôle de l'opposition. «Le Conseil cherchera à maintenir la paix et la sécurité dans les villes libérées de toutes ses forces. Il permettra également de planifier et travailler à la libération des autres villes encore tenues par le tyran Kadhafi Mouammar et sa bande.»
Qui le compose?
Le CNL est composé de 31 membres représentant les différentes villes et régions de Libye. Certains sont anonymes, pour prévenir toute menace sur leurs familles dans les régions encore sous le contrôle de Kadhafi. Le chef du CNL n’est autre que l'ancien ministre de la Justice de Mouammar Kadhafi, Moustafa Abdeldjelil. Le régime libyen a d’ailleurs promis mercredi une récompense financière d'un demi-million de dollars à toute personne qui l’arrêterait et le remettrait aux autorités. Le vice-président et porte-parole du Conseil est un avocat spécialisé dans les Droits de l’homme, Abdelhafez Ghoqa.
Le 5 mars, le CNL a également nommé un «comité de crise» afin d'accélérer le processus de décision. Omar Hariri, l'un des officiers qui avaient participé au coup d'Etat de Mouammar Kadhafi en 1969 avant d'être emprisonné, a été nommé chef des affaires militaires. Ali Essaoui, ancien ambassadeur en Inde qui a démissionné en février dernier, a été chargé des Affaires étrangères. Mahmoud Djebril, qui a participé avec un groupe d'intellectuels, avant la révolte, au projet «Vision libyenne» d'établissement d'un Etat démocratique, a été nommé chef de ce comité de crise.
Qui le reconnaît?
Samedi, Moustafa Abdeldjelila déclaré à Al-Jazira qu’il avait pris des contacts à l'étranger pour que le CNL soit reconnu comme unique représentant du peuple libyen. «Il y a des contacts officiels avec des pays arabes et européens», a-t-il dit. Le Conseil national de transition souhaite être reconnu comme le représentant légitime du peuple libyen, car de cette reconnaissance dépend selon lui l'aide que pourra lui apporter la communauté internationale.
Ce jeudi, après l’entretien de Nicolas Sarkozy à l'Elysée avec deux émissaires du CNL, la France a officiellement reconnu le conseil comme «représentant légitime du peuple libyen», a déclaré une source à la présidence française. La France, a ajouté l'Elysée, enverra un ambassadeur à Benghazi. Le 6 mars, la France avait déjà «salué la création du Conseil national libyen et apporté son soutien aux principes qui l’animent et aux objectifs qu’il s’assigne».
Le Parlement européen doit adopter ce jeudi une résolution dans laquelle tous les groupes politiques demanderont la reconnaissance officielle du CNL. Cependant, la haute représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, traîne des pieds. Elle a indiqué mardi qu'elle transmettrait la position des eurodéputés au Conseil européen, qui tient une réunion sur la Libye vendredi matin à Bruxelles, mais ne s'est pas engagée à préconiser une telle reconnaissance. «La reconnaissance d'un gouvernement est un mandat octroyé par le Conseil européen. C'est aux Etats membres de définir ce genre de choses», a-t-elle affirmé.