REPORTAGEEgypte: Place Tahrir, de la joie à la colère

Egypte: Place Tahrir, de la joie à la colère

REPORTAGELes manifestants ont déchanté, jeudi...
Reuters (Tom Perry)

Reuters (Tom Perry)

La joie a tourné à la déception puis à la colère, jeudi, place Tahrir, au Caire, lorsque le président Hosni Moubarak a annoncé qu'il remettait ses pouvoirs au vice-président mais qu'il ne démissionnerait pas.

Une foule immense garnie d'innombrables drapeaux égyptiens s'était rassemblée dans l'après midi sur la place et s'est laissé peu à peu gagner par la certitude d'un départ imminent du chef de l'Etat.

«Ce soir il dégage!», scandaient certains, dont la confiance allait croissant au fil des annonces relayées par la presse. Certains annonçaient son départ pour l'Allemagne, d'autres le voyaient déjà aux Emirats arabes unis.

Sur le visage des nouveaux venus, les organisateurs de la contestation étalaient les couleurs nationales, donnant un air de carnaval à ce rassemblement bon enfant.

Comme depuis plusieurs jours, islamistes portant la barbe côtoyaient militants de la gauche laïque et autres progressistes issus de toutes les couches de la population, souvent venus en famille. «Dégage !», pouvait-on lire sur le front d'une fillette perchée sur les épaules de son père.

«Il ne veut pas comprendre»

Alors qu'Hosni Moubarak s'apprêtait à prendre la parole pour sa troisième intervention télévisée depuis le début des troubles, beaucoup s'imaginaient déjà en témoins directs de l'histoire en marche. «Assis! Assis!», a-t-on hurlé et la foule a aussitôt obtempéré comme un seul homme.

De nouveaux appels au calme ont retenti lorsque le raïs est apparu à l'écran et le silence s'est fait aussitôt. A la lueur d'un quartier de lune, des militaires perchés sur leur char se montraient plus attentifs encore.

Moins d'une minute plus tard, la ferveur avait cédé la place à la stupeur, illustrée par cet homme hochant la tête en silence. Bientôt, certains se déchaussaient et menaçaient l'écran de leurs semelles, d'autres pointaient un doigt menaçant ou tournaient le pouce vers le sol tandis que quelques uns fondaient en larmes.

A mi-discours, la patience de la foule était à bout. «Dégage! Dégage! Dégage!», scandait-elle à nouveau. «Il ne veut pas comprendre. Les gens ne veulent pas de lui au pouvoir. Il s'y accroche de façon très bizarre», commentait un jeune manifestant de 23 ans.

A la fin de l'allocution, certains ont aussitôt quitté la place. «Ne désespérez pas!», leur a lancé un organisateur. «Il n'y a pas de désespoir, pas plus que de reddition!», lui-t-on aussitôt répondu. Une «Journée des Martyrs» à la mémoire des victimes des manifestations est prévue vendredi.