INTERNETTony Meilhon, ennemi public numéro 1 sur le Web

Tony Meilhon, ennemi public numéro 1 sur le Web

INTERNETLe suspect dans l'affaire de la disparition de Laëtitia à Pornic rassemble contre lui...
Catherine Fournier

Catherine Fournier

Article mis à jour le 31 janvier 2011: Les deux groupes Facebook sur Tony Meilhon ont été supprimés. Mais un nouveau a été créé, qui compte 66 membres.

Il est toujours présumé innocent, mais sur la Toile, il est déjà coupable. Tony Meilhon, le principal suspect dans l’affaire de la disparition de Laëtitia à Pornic, est devenu l’ennemi public numéro 1. Celui qui cache la vérité, empêchant les familles de «faire leur deuil».

En marge de nombreux groupes Facebook créés à la mémoire de la jeune fille, dont l'un est officiellement soutenu par son père biologique et compte près de 5.000 membres, deux pages souhaitant un sort peu favorable à cet individu âgé de 31 ans sont restées en ligne un certain temps, avant d'être supprimées. L’une d’entre elles était passée en quelques jours de quelques fans à près de 1.500. Outre les insultes et les menaces, les contributeurs publiaient également sur cette page des informations relatives à l’enquête et des appels à participer à aux recherches.

Documents compromettants

Photos des supposés véhicules de Tony Meilhon, avec zoom sur la plaque d’immatriculation, images du lieu où il vivait ces derniers temps, cartes et google maps sur l’itinéraire supposé du suspect et de la jeune fille le soir du 18 janvier, portraits de l’homme, afin de pouvoir l’identifier… Des nombreux documents compromettants pour le suspect étaient accessibles.

Des informations surveillées de près par les services de gendarmerie en charge de l’enquête, qui effectuent comme dans chaque affaire ce qu’on appelle un «monitoring medias». Le Net en fait désormais partie. Selon une source proche de l’enquête, voir fleurir des groupes Facebook autour d’un fait-divers est très fréquent, mais «cette affaire est une conjonction de plusieurs éléments.» Elle est très médiatisée parce qu’elle dure, la jeune Laëtitia n’ayant toujours pas été retrouvée. Et elle intervient dans un «contexte de controverse sur le suivi des peines», relancée récemment par le meurtre et le viol de la joggeuse Natacha.

Présomption d’innocence

Reste que selon les enquêteurs, le profil de Tony Meilhon ne correspond pas à celui d’un «prédateur sexuel psychopathe». Il s’agit plutôt d’«un type ultra-violent désocialisé». En outre, même les éléments à charge sont nombreux, il bénéficie toujours de la présomption d’innocence, et ce jusqu’à son éventuelle condamnation définitive.

Il n’empêche, Tony Meilhon est présenté comme déjà coupable et serait même impliqué, selon certains internautes, dans d’autres affaires irrésolues, comme celle des étudiants disparus de Nantes.

Sentiment d’impunité

«Les foules d’hier comme les foules d’aujourd’hui ne supportent pas d’attendre. Attendre, c’est penser. Penser, c’est se défaire de la foule. Se défaire de la foule, c’est abandonner la toute puissance imaginaire qu’elle offre. Hier, on jetait une corde au-dessus d’une branche. Aujourd’hui, on crée un groupe Facebook», analyse sur son blog le psychanalyste Yann Leroux, auteur d’une thèse sur la Psychodynamique des groupes sur le réseau Internet. Et d’ajouter: «Cependant, hier comme aujourd’hui, l’enthousiasme avec lequel ces foules se rassemblent ne doit pas faire oublier qu’elles enfreignent la loi.»

Dans le cas des groupes sur Tony Meilhon, la liste est longue: non respect de la présomption d’innocence, incitation à la haine ou à la violence, diffamation… Mais comme le rappelle Yann Leroux, «une foule offre de grands avantages par rapport à l’individu (…) Elle permet à chacun de se montrer agressif, violent ou cruel en toute impunité». Même si sur Facebook, ladite foule peut être identifiée, le sentiment d’impunité semble en effet dominer. Pas sûr, en effet, que des poursuites soient engagées par quiconque dans cette affaire.