Toutes les astuces des entreprises pour espionner leurs concurrents
ÉCONOMIE•uand la «guerre économique» franchit la ligne jaune...Thibaut Schepman
Un homme déguisé en plombier s’introduit dans des bureaux pour y dérober des informations secrètes. Non, il ne s’agit pas du scénario d’un énième film d’espionnage. Ce genre de pratiques a cours aujourd’hui entre entreprises concurrentes. Renault a même mis à pied mercredi trois cadres qu’elle soupçonne d’avoir livré des informations à la concurrence.
Car «l’information économique vaut aujourd’hui de l’or, plus cher que les matières premières ou le pétrole», estime Christian Harbulot, directeur de l’EGE (Ecole de guerre économique), qui forme de futurs experts en intelligence économique. 20minutes.fr a interrogé des spécialistes de la «guerre économique», qui révèlent le mode opératoire des espions.
Camouflages et introductions sans effraction
Vous voulez être régulièrement tenu au courant des projets de votre concurrent? Faites appel à la même société de maintenance que lui. «Les prestataires de service opèrent quotidiennement dans les bureaux et en l’absence de la majeure partie des salariés. Il est tout à fait possible de soudoyer un agent de maintenance ou de mobiliser une personne pour qu’elle se charge de recueillir des informations», explique Nicolas Christen, directeur du cabinet d'investigations de Strasbourg (CIS).
Et si vous n’avez aucun prestataire en commun, il vous reste toujours l’option du camouflage. Christian Harbulot, directeur de l’EGE (Ecole de guerre économique), cite notamment un cas d’espionnage survenu «dans une entreprise française de tri de courrier». «L’espionne d’une entreprise d’Europe de l’Est s’y est introduite et y a passé plusieurs jours sous couvert d’une mission d’audit réalisée par un faux cabinet britannique. Elle a été prise en flagrant délit alors qu’elle photographiait le nouveau prototype de machine de tri», raconte-t-il, s’indignant du manque de précautions prises par les services de sûreté des entreprises.
Car les espions n’ont parfois même pas besoin d’utiliser ces méthodes. «Pour tester la sécurité, l'un des tests de sécurité que nous effectuons consiste à entrer au sein de l'entreprise librement afin de constater à quelles informations un visiteur quelconque peut avoir accès sans être inquiété par un tiers sur la raison de sa présence», raconte Nicolas Christen, qui confie que les «salariés hésitent souvent longtemps avant de questionner l’intrus». Reste aussi la bonne vieille fouille de déchets, qui apportent leur lot d’informations «top secrètes».
Soudoiement de concurrents
La grande majorité des cas d’espionnage se produisent «en interne». Le cas classique? Un commercial débauché dérobe un fichier client avant de quitter son poste. «L’un des premiers conseils donné à nos clients est de veiller à avoir un climat social appaisé», assure Nicolas Christen. Car un employé qui s’estime mal considéré aura moins de scrupules à livrer des informations confidentielles contre quelques billets.
Faux entretiens d’embauche
Comment soutirer des informations à un cadre concurrent trop intègre pour être corrompu? Faites-vous passer pour un chasseur de tête et proposez lui un poste chez un concurrent avec une grosse augmentation. Si la personne postule, elle vous livrera tous les renseignements souhaités. «Lors de l’entretien d’embauche, le candidat a forcement envie de se valoriser et il va souvent raconter ses missions, ses projets, même s'ils sont parfois confidentiels», explique Nicolas Christen, qui assure avoir déjà vu «des cadres chargés de la recherche dans des entreprises de haute technologie» victimes du procédé.