AFRIQUECôte d'Ivoire: Les pro-Ouattara violemment réprimés

Côte d'Ivoire: Les pro-Ouattara violemment réprimés

AFRIQUEQuelque 800 casques bleus sont déployés autour de l'hôtel de Golf...
Armelle Le Goff et M.P.

Armelle Le Goff et M.P.

Des tirs à l’armes lourdes à Abidjan, des manifestants dispersés par les forces de sécurité ivoiriennes tirant à tirs à balles réelles à Yamoussoukro, la capitale administrative du pays, la Côte d’Ivoire était au bord de l’embrasement jeudi, jour où les partisans d’Alassane Ouattara avaient décidé de marcher sur la télévision d’Etat ivoirienne. En vain, les manifestants n’ont jamais pu atteindre le bâtiments, des soldats fidèles à Laurent Gbagbo, le président sortant, ont fait feu sur le cortège.

Les Etats-Unis, la France et les puissances africaines ont fait savoir à Laurent Gbagbo, le président sortant de Côte d'Ivoire, qu'il disposait d'un «temps limité» pour décider de son attitude future et ils estiment qu'il pourrait se retirer pour éviter des sanctions, a déclaré jeudi un responsable américain. «Nous avons certaines raisons de croire que M. Gbagbo a bien reçu le message», a dit un responsable américain sous couvert d’anonymat.

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Selon les sources, les chiffres sont très différents, mais, vraisemblablement, les violences auraient fait plusieurs dizaines de morts et une centaine de blessés. Le camp Ouattara annonce une trentaine de morts dans tout Abidjan, tandis qu’Amensty International n’en compte que 9. Le clan Gbagbo en compte 20 dont 10 des forces de l'ordre.

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Signe de l’extrême tension qui régnait toujours jeudi soir, l’Onu annonçait avoir posté 800 de ses soldats autour de l’hôtel du Golf où est retranché Alassane Ouattara. Le bâtiment, toujours d’après le camp Ouattara, avait été cerné par les forces loyales à Laurent Gbagbo et même essuyé des tirs.

Gbagbo prêt aller jusqu’au bout

Mardi, Alassane Ouattara, proclamé vainqueur du second tour de la présidentielle, le 28 novembre, avec 54 % des suffrages par la Commission électorale indépendante (CEI) contre Laurent Gbagbo, qui refuse de céder sa place, avait appelé « la population ivoirienne dans toutes ses composantes » à marcher sur Abidjan et reprendre le contrôle de la Radio télévision ivoirienne (RTI).

Mais sans le soutien de l’armée, fidèle au président sortant, l’initiative était à hauts risques. Néanmoins, « c’était la seule possibilité pour Ouattara de sortir de l’ornière, analyse Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Il lui fallait agir, car, en fait, le temps joue pour Laurent Gbagbo. On sait comment cela se passe : les premiers jours la communauté internationale est très ferme et puis, au fil des semaines, elle est obligée d’accepter la situation qui s’impose à elle ».

De nouveaux affrontements à craindre

Mais, même sous la pression populaire, il est peu probable que Gbagbo accepte de se retirer. « Des propositions lui auraient été faites, notamment pour prendre la présidence l’Union africaine (UA), doublées de la promesse de ne pas être poursuivi, mais il aurait tout refusé, explique Philippe Hugon. Il considère qu’il a une mission et qu’il doit aller jusqu’au bout ».

Alassane Ouattara compte lui aussi aller jusqu’au bout. Jeudi soir, il a appelé ses partisans à reprendre la marche vendredi sur la télévision d’Etat. «Nous continuerons à défiler. Demain, nous essaierons de nouveau de nous rendre à la (radio-télévision d'Etat) RTI», a déclaré un porte-parole de l'équipe Ouattara, Patrick Achi. Vendredi, Guillaume Soro, l’ex-chef des Forces nouvelles et le nouveau Premier ministre d’Alassane Ouattara a annoncé qu’il comptait marcher avec ses proches sur les bâtiments d’Etat, et tenir son premier conseil des ministres au siège du gouvernement. De nouveaux affrontements sont à craindre.