Retraites: Un texte voté dans la tension
POLITIQUE•«Le combat continue», a assuré Jean-Marc Ayrault...M.P.
Entre 10h du matin, heure de la suspension de séance décidée par Bernard Accoyer, le président de l’Assemblée nationale, et 15h, l’heure de la reprise, la tension n’est pas retombée au sein du Palais Bourbon. Bien au contraire. Entre temps, les députés socialistes ont réclamé solennellement la démission du président du perchoir, tendant un peu plus l’ambiance. Et lorsqu’ils se sont présentés dans l’hémicycle, c’est ceints de leur écharpe tricolore d’élus, restant debout durant toute la séance, une petite heure, qui a abouti au vote, par 329 voix contre 233, du projet de loi sur la réforme. Parmi les opposants au texte, figurent aussi François Bayrou et Jean Lassale, les deux députés MoDem, ainsi que Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la République. En revanche, huit députés villepinistes déclarés se sont abstenus, parmi lesquels François Goulard, Jean-Pierre Grand, Jacques Le Guen, Marie-Anne Montchamp, Marc Bernier, tous UMP, ainsi que l'ex-UMP Daniel Garrigue.
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Tour à tour, opposition et majorité ont hué ou applaudi les différents interlocuteurs selon qu’ils appartiennent à leur camp ou pas. Accueilli par des «Démission, démission» hurlés par l’opposition, Bernard Accoyer a ouvert la séance en expliquant sa décision de suspendre la séance dans la matinée, dénonçant «la stratégie délibérée d’obstruction de l’opposition». Avant de mettre le texte aux votes, il a passé la parole aux présidents des différents groupes parlementaires. Dans son intervention, Jean-Marc Ayrault, le patron des députés socialistes a parlé d’une «crise morale et politique». «Aujourd'hui notre République est abîmée. Notre République perd ses repères lorsque des ministres confondent l'intérêt général et l'intérêt de l'UMP», a-t-il lancé. Mais malgré la «parole confisquée» aux députés, «le combat continue, la bataille n’est pas finie», a assuré le député-maire de Nantes, sifflé par une partie des députés. «Chaque jour, avec tous les Républicains, nous continuons à nous mobiliser pour ouvrir les voix de l’alternance. Nous voulons remettre la politique à l’endroit», a-t-il conclu.
«Où est le Premier ministre»
Assis au banc des ministres, le ministre du Travail, Eric Woerth, qui a défendu le texte pendant une semaine malgré les soupçons qui pèsent sur lui dans l'affaire Bettencourt, a levé les yeux au ciel, impassible. Georges Tron, secrétaire d’Etat à la Fonction publique se trouvait à ses côtés, mais pas le Premier ministre François Fillon. Ce qui a eu le don d’agacer Martine Billard, député du Parti de gauche, qui a pris la parole au nom du groupe GDR (Verts, communiste et PG). «Où est le Premier ministre» au moment du vote de «cette contre-réforme sociale?», a demandé l’élue de Paris, qui a fustigé le «putsch» de Bernard Accoyer, «organisé aux ordres de l’Elysée». «Le pouvoir est aux abois. Vous avez peur du peuple! Même pas 5 minutes par député ce matin, c'est cela que vous appelez la démocratie! Vous êtes un gouvernement de menteurs!», a-t-elle lancé. «Vous avez perdu la bataille dans l’opinion publique, les sénateurs vont reprendre le flambeau et vous serez obligés de reculer», a-t-elle assuré.
«Un calendrier voté par l’Elysée»
A ces critiques, le patron des députés UMP Jean-François Copé, de son côté, a répondu en s’indignant de la «stratégie de détournement» utilisée par les socialistes pour «faire oublier que vous avez été, vous, socialistes, incapables» d’avoir «une ligne politique claire et lisible sur le sujet» des retraites. Au nom du Nouveau Centre, François Sauvadet, lui, a taclé les «postures» de la gauche et son «absence de projet». Répondant à Jean-Marc Ayrault, il a lancé, applaudi par les élus de la majorité: «Ce qui abîme la République, ce sont les allégations, les accusations sans preuve», a-t-il lancé. A l’issue du vote, Aurélie Filipetti expliquait le coup de colère du groupe socialiste. Pour elle, «il y a un ordre clair de Nicolas Sarkozy de faire voter le texte aujourd’hui à 15 heures. Il y a un calendrier voté par l’Elysée pour démobiliser les manifestants avant le 23 septembre», prochaine journée de mobilisation prévue par les syndicats.
Le texte doit maintenant être examiné au Sénat, en séance publique, à partir du 5 octobre. Nicolas Sarkozy a promis aux sénateurs UMP qu’ils auraient un peu de «marge» lors de l’examen du projet de loi.
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