BIOETHIQUEVers une levée de l'anonymat pour les donneurs de sperme

Vers une levée de l'anonymat pour les donneurs de sperme

BIOETHIQUEUne nouvelle qui pourrait avoir des conséquences sur le nombre de dons...
Ingrid Gallou

Ingrid Gallou

Sa profession, sa ville, sa taille, et peut-être son nom. Des informations banales mais qui, pour les enfants issus d'une insémination artificielle avec donneur (environ 1.300 chaque année), peuvent paraître inestimables. Or, jusqu'à présent, le don, strictement anonyme, empêche toute mise en relation des géniteurs et des enfants.

Mardi soir, Roselyne Bachelot, la ministre de la Santé et des Sports, a révélé que le projet de révision des lois de bioéthique, en examen au Parlement en novembre, prévoyait un droit d'accès aux données non-identifiantes, ainsi qu'une levée de l'anonymat du donneur, si celui-ci y consent.

Probabilité d'inceste nulle

Une remise en question qui intervient alors que les premiers enfants conçus grâce à ces dons sont trentenaires et militent pour la levée de l'anonymat. Raphaël Molenat, devenu avocat spécialisé en bioéthique, en fait partie. «On m'interdit de connaître une partie du puzzle qui me constitue, dénonce-t-il. J'ai besoin de savoir, pour arrêter de me demander si la fille avec qui je sors est ma demi-sœur», lâche Raphaël.

«Concernant le fantasme d'inceste, la probabilité est nulle, nous l'avons étudiée», répond le psychologue Jean-Loup Clément, auteur de Mon père, c'est mon père, aux éditions L'Harmattan.

Les donneurs pour le maintien de l'anonymat

Pour lui, la levée de l'anonymat est «insensée», d'autant qu'elle pourrait pousser les parents à taire auprès de leurs enfants leur conception, plutôt que de prendre le risque de voir «le donneur sortir du placard à la majorité de leur enfant». «C'est la porte ouverte à tous les secrets de famille», résume-t-il.

La question est primordiale, estime aussi Jean-Marie Kunstmann, vice-président des Centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos). Son inquiétude: que la nouvelle loi puisse dissuader les donneurs. «Ils sont pour le maintien de l'anonymat», confirme-t-il. Dans une étude de 2006, deux tiers d'entre eux affirmaient qu'ils arrêteraient leurs dons en cas de levée de l'anonymat.