Secoué, le dry martini, mais pas agité

Secoué, le dry martini, mais pas agité

Ivresse
Stéphane Leblanc

Stéphane Leblanc

Du gin avec une larme de vermouth blanc sec. Telle est la recette d'un cocktail mythique, le dry martini, qui a marqué l'histoire, la littérature et le cinéma, rien que ça. Truman Capote, Ernest Hemingway, Cary Grant, Humphrey Bogart ou Roosevelt le trouvaient fort à leur goût, 007 aussi. Pour rendre hommage à la Bond Girl Vesper Lund, James Bond rebaptise « Vesper » le premier dry martini qu'il commande dans le roman Casino Royale, en 1953. Première entorse à la recette originale : James Bond exige une mesure de vodka pour trois mesures de gin. « La vodka est un alcool neutre, qui coupe les parfums du gin », explique le barman Guy Musart*. On peut comprendre 007, « surtout en France où l'on n'apprécie guère le gin », s'amuse le barman. Deuxième entorse : Bond commande son dry martini « shaken not strirred », « secoué, mais pas agité ».

Effets ravageurs
« Secouer au skaker brutalise un peu les ingrédients, souligne Guy Musard, mais n'influe guère sur le goût. » La précision renseigne plutôt sur le caractère bien trempé du héros. Et la réplique sert de running gag quand elle revient au fil des épisodes… « Ce cocktail se prête bien aux réinterprétations », concède aussi le barman. Après tout, Winston Churchill ne prenait que du gin en affirmant qu'un regard vers la bouteille de vermouth lui suffisait. Luis Buñuel, au contraire, aimait mouiller les glaçons de vermouth, sans forcément les mettre ensuite dans du gin.
Attention toutefois aux effets… ravageurs du breuvage. « J'adore boire un ou deux drys martinis, racontait l'écrivain et scénariste Dorothy Parker. Avec trois, je suis sous la table, avec quatre, je suis sous mon hôte. » Le slogan invitant à boire avec modération restait à inventer.