POLITIQUECollaborateur parlementaire: «Ça fonctionne comme dans une baraque à frites»

Collaborateur parlementaire: «Ça fonctionne comme dans une baraque à frites»

POLITIQUEIls sont plus de 2.000 à travailler et à souffrir dans l'ombre des députés...
Mathieu Gruel

Mathieu Gruel

Pas de DRH, pas de statut, pas de grille de salaire… Et pour certains, plus beaucoup d’illusions sur leur métier. Collaborateur parlementaire, la profession est pourtant exercée par un peu plus de 2.000 personnes en France, dont les représentants devaient rencontrer le président de l’Assemblée nationale ce mercredi.

>> «Claude Bartolone à la rencontre des collaborateurs parlementaires», c’est à lire par ici

Entrés pour la plupart par cooptation, en espérant pour certains embrasser une carrière en politique, comme François Fillon ou Marylise Lebranchu avant eux, ces assistants œuvrent jour et nuit aux côtés des députés. Chargés de leur communication, de gérer leurs agendas voire parfois plus, ils touchent en moyenne entre 1.500 et 1.900 euros par mois, pour des semaines de 70 heures.

Un métier que Brigitte, la cinquantaine, adorait. «Ça m’a plu de bosser à l’Assemblée nationale, d’être au cœur du pouvoir», mais elle le reconnaît, c’est un «boulot un peu spécial». Aujourd’hui, les deux députés, réélus, pour lesquels elle travaille, veulent se passer de ses services. «Je pense que c’est parce que j’ai vu des choses», explique-t-elle.

«Harcèlement moral et sexuel»

Et comme elle, beaucoup sont ainsi virés sans motif, ni lettre préalable au licenciement. Le flou juridique qui entoure la profession pousse même certains parlementaires à employer des méthodes douteuses, pour se séparer de leurs collaborateurs. «Harcèlements moral et sexuel sont très fréquents», détaille en effet Jean-François Cassant, de l’Union syndicale des collaborateurs parlementaires.

Entré dans la profession en 1997 aux côtés de Noël Mamère, ce cinquantenaire porte un regard plutôt sévère sur l’institution dans laquelle il travaille. «C’est comme du Zola dans cette maison, ça fonctionne comme dans une baraque à frites, mais en pire», explique-t-il, avouant son impuissance face à la souffrance de ses collègues ou les tentatives de suicide, dont certaines ont eu lieu dans les locaux de l’Assemblée.

Femmes enceintes virées systématiquement

Installés au Palais Bourbon ou dans les permanences en province, «où c’est encore pire», ces collaborateurs sont donc habitués à la précarité. «Les femmes enceintes sont systématiquement virées», ajoute Jean-François Cassant.

Ce dernier, à la tête d’«un syndicat apolitique», «sans locaux et sans personnel», continue pourtant à se battre, pour faire évoluer la condition de ces salariés particuliers.

Promettant d’essayer de ne pas lui-même «péter un plomb», il confie ne pas attendre grand-chose de la rencontre avec Claude Bartolone, prévue ce mercredi. Et regrette que d’«anciens collègues aient très vite oublié leur passé de collaborateur parlementaire», en gravissant les échelons du pouvoir.